Avec notre correspondant à Istanbul, Jérôme Bastion
« Une laïcité battue en brèche » par ces amendements constitutionnels, l'argument censé faire mouche tant dans l’opinion publique locale qu’à l’étranger, en Europe principalement, frise le procès d’intention. L’opposition n’en a peut-être tout simplement pas d’autre pour justifier de refuser la démocratisation des institutions.
Il est difficile, honnêtement, de saisir comment ces réformes pourraient mettre en danger la laïcité. Sauf à dire, que, si l’influence des juges et des militaires sur la vie publique et politique est réduite au nom de la démocratie, c’est une menace pour les principes laïcs de la République turque.
Comme les pouvoirs judiciaire et militaire, sont considérés comme les deux piliers du sécularisme, protégeant l’héritage de Mustafa Kemal, c’est le raisonnement que l’opposition, qui appelle à voter « non », tente d’instiller dans les esprits.
Mais il n’y a aucune mesure dans la réforme qui touche de près ou de loin à la religion. Que les militaires puissent être jugés devant des tribunaux civils pour avoir renversé ou tenté de renverser le gouvernement élu, ne saurait être considéré comme une atteinte à la laïcité.
De même que le changement de mode de désignation des juges de la Cour constitutionnelle et du Haut conseil de la magistrature ne signifie pas que le pouvoir veut rogner les valeurs laïques. La réforme du gouvernement peut être bâclée, incomplète, timorée ou de pure forme, mais on ne peut dire qu’elle vise à l’islamisation de la société.