En Belgique, tout le monde en parle, mais personne n’y croit vraiment. Plus ou moins ouvertement, les partis flamands soutiennent l’idée de la séparation de leur région de la Wallonie, majoritairement francophone et fédéraliste. Les Flamands pensent sans doute prendre actuellement une revanche historique pour les humiliations qu’ils avaient subies dans le passé de Wallons qui occupaient longtemps une position dominante sur le plan politique et économique.
Le problème de la Belgique, c’est que ça va périodiquement bien soit pour l’une des communautés, soit pour l’autre, mais jamais pour les deux à la fois. Ainsi, quand la crise a ruiné l’industrie lourde wallonne, ce qui a coïncidé avec un beau développement de l’industrie automobile en Flandre, les Flamands sont progressivement arrivés à la conclusion qu’ils payaient trop pour les francophones. Terreau fertile pour les formations populistes et nationalistes qui sont partis de cette conclusion pour en arriver à une autre : qu’il fallait couper les liens entre les deux parties de la Belgique, situées des deux côtés de la « frontière linguistique » établie en 1963.
« Egoïstes » contre « parasites »
Résultat ? Les Wallons perçoivent les Flamands comme égoïstes et arrogants ; les Flamands reprochent aux francophones d’être des paresseux parasites. Le plus virulent, le NVA avec son leader charismatique Bart de Wever, souhaite que la Belgique « disparaisse sans que personne ne s’en aperçoive ».
Le scénario serait difficile à mettre en œuvre. Comment diviser la sécurité sociale, le système des retraites, l’armée et la dette belge ? Et même si la Belgique se divisait en deux nouveaux Etats, que faudrait-il faire avec Bruxelles qui constitue actuellement une région à part, de surcroît siège des principales institutions de l’Union européenne et de l’Alliance atlantique ? Un troisième nouvel Etat ? Une ville libre ? Un espace extraterritorial ? Une république des fonctionnaires ?
Guerre des clichés
Les nationalistes flamands sont clairement en train d’essayer de démontrer par l’absurde qu’il est impossible de gérer la Belgique sous sa forme actuelle. Mais, paradoxalement, sans s’en rendre compte, ils prouvent en même temps le contraire. Car, quand on commence à songer aux alternatives à cette forme, on arrive à un niveau d’absurdité bien plus élevé et on voit bien que toute nouvelle solution serait encore moins gérable.
Toutefois, la guerre des clichés entre les Flamands et les Wallons est un sujet très porteur politiquement qui éclipse totalement tous les autres dans la campagne électorale. Parmi eux, le plus important : la crise économique et les moyens d’en sortir.
Un gouvernement difficile à trouver
Pour l’instant, c’est la crise politique qui est sur toutes les lèvres. Les élections anticipées étaient conçues comme moyen de la résoudre après le départ du parti libéral flamand Open VLD du gouvernement d’Yves Leterme. Cependant, il y a fort à parier que les résultats du scrutin vont rendre la crise encore plus profonde. Car la poussée attendue des indépendantistes en Flandre peut singulièrement compliquer les négociations en vue de créer un gouvernement au niveau fédéral. La formation du dernier gouvernement Leterme a nécessité plus de six mois de tractations. Cette fois, le processus sera sans doute beaucoup plus difficile à conclure.
La Belgique prend la présidence tournante de l’Union européenne le 1er juillet prochain. A cette date, elle risque de ne pas encore avoir un nouveau gouvernement et de se retrouver à la tête de l’Europe communautaire en symbolisant tout sauf amitié et coopération entre différentes communautés.