De notre correspondante à Londres,
Le gouvernement britannique a d’ailleurs bien du mal à contenir son agacement, face à l’opportunisme de Nigel Farage, qui s’est empressé de se rendre à New York après la victoire de Donald Trump et a été reçu par le nouveau président élu pendant près d’une heure.
Il faut dire que la tentation était trop belle pour le chef de Ukip – tout auréolé de la victoire du Brexit et qui avait soutenu Donald Trump – de montrer que les deux hommes étaient sur la même longueur d’onde et avaient une connexion privilégiée.
Evidemment, pour le gouvernement conservateur britannique, la pilule est difficile à avaler. Se voir donner des leçons de diplomatie par un homme qui n’est même pas député et qui est le dirigeant en partance d’un parti en pleine déconfiture, ça fait désordre et c’est humiliant. D’où la réponse cinglante de Downing street : Theresa May n’a nul besoin d'une « tierce personne » pour nouer des liens forts avec Washington.
Oppositions
Mais certains députés conservateurs critiquent le manque de souplesse de Theresa May et font remarquer que toute aide est la bienvenue, alors que dans un premier accroc à la « relation spéciale » entre les deux pays, Theresa May n’a pu parler avec Donald Trump qu'après neuf autres dirigeants.
Surtout, Liam Fox, le ministre du Commerce et défenseur du Brexit, tenterait de convaincre Theresa May d’utiliser la connexion personnelle entre Nigel Farage et Donald Trump, dans l’espoir de forger des liens commerciaux solides post-Brexit. Mais pour l’instant, la première ministre oppose une fin de non-recevoir à une initiative qui risquerait de redonner de l’importance à un homme et un parti populiste qui ont siphonné de nombreux électeurs conservateurs.
« Effet marmite »
Nigel Farage a un « effet marmite » : la célèbre pâte à tartiner anglaise. En clair, soit on adore, soit on déteste. La réaction a donc été épidermique, notamment dans les journaux. Pour le pro-Brexit Daily Telegraph, le refus de travailler avec le fondateur du Ukip est une « occasion manquée » et « peu clairvoyante », alors que Nigel Farage entretient une relation privilégiée et de longue date avec Steve Bannon, le très controversé mais aussi très puissant bras droit de Trump.
A l’inverse, le Times se lamente de l’importance donnée à Farage et estime que c’est la faute de Theresa May « qui n’a rien à dire sur les grandes questions de politique étrangère et traite son chef de la diplomatie Boris Johnson comme un idiot à qui on ne peut pas faire confiance », créant ainsi un vide diplomatique dans lequel vient de s’engouffrer Nigel Farage, devenu « de facto le ministre des affaires étrangères britannique ».