Avec une seule certitude pour le moment, son salut passe par un rapprochement avec une entreprise non européenne. Et pourtant, c'est bien le fait qu'un fleuron français puisse passer sous pavillon étranger - américain - qui a provoqué tant d'émoi au gouvernement. Le ministre de l'Economie Arnaud Montebourg a travaillé d'arrache-pied pour faire émerger une solution européenne avec le concours de Siemens, l'éternel rival d'Alstom. Et c'est finalement le Japonais Mitsubishi qui apparaît cette semaine comme la seule alternative à l'Américain. Associé à Siemens, il met plus d'argent sur la table que GE, il propose une montée dans le capital plutôt que l'acquisition pure et simple de cette branche énergie qui suscite tant de convoitise. Il sanctuarise la branche des turbines utilisées dans les centrales nucléaires que la France construit pour son marché comme pour l'exportation. Et enfin, il garantit autant de création d'emplois que GE. Bref, il rassure les autorités publiques. Dans ce mécano nippon, la perspective de créer un Airbus du rail, comme le souhaite le ministre de l'Economie, s'éloigne. Ce chantier sera mis en oeuvre dans un deuxième temps seulement, sur la base d'un rapprochement avec Siemens.
Le rôle du gouvernement a-t-il été positif dans cette affaire ?
Pour le moment, l'implication du gouvernement a surtout permis de faire monter les enchères. Ce matin encore l'Agence France-Presse évoque le dernier cadeau que General Electric s'apprête à glisser dans la corbeille. L'Américain cèderait à Alstom son activité signalisation, le segment le plus juteux du ferroviaire. Le grand patron américain sera demain à Paris pour préciser ses plans.
Sur le fond, l'Etat a surtout brouillé les cartes. En insistant sur la nationalité du groupe, les enjeux industriels du rapprochement avec un concurrent ont fini par passer au second plan. Alstom a déjà été nationalisé puis privatisé deux fois, et le groupe se trouve une nouvelle fois en difficulté. L'intervention publique n'apparaît donc pas comme la panacée pour répondre aux défis de la concurrence.
Quels critères les administrateurs vont-ils prendre en compte pour prendre leur décision ?
Le plus évident, l'argent mis sur la table, plus de 12 milliards d'euros, ne sera pas forcément déterminant. Ce qui compte, c'est la faisabilité du montage. Car les alliances et les fusions connaissent un taux d'échec extrêmement important. Il faut donc choisir le scénario le plus opérationnel, le plus réaliste. L'offre du Japonais n'est pas la plus simple. Par ailleurs, les ennuis judiciaires d'Alstom aux Etats-Unis penchent en faveur de General Electric. Alstom est poursuvi par la justice américaine pour des faits de corruption commis en Indonésie. Un rachat par General Electric permettrait de mieux gérer ce dossier délicat.