Brésil: le manque d'électricité pourrait gâcher la fête du ballon rond

Au Brésil, l'organisation du Mondial vire à l'épreuve de force pour le gouvernement. Sa nouvelle préoccupation : éviter la pénurie d'électricité qui menace tout le pays.

Il y a une chance sur quatre pour que la panne de courant gâche la grande fête du ballon rond. Une probabilité énorme, proportionelle au rôle joué par les barrages dans la production électrique du pays. Car au Brésil, les deux tiers du courant sont fournis par ces immenses ouvrages construits sur les grands fleuves du pays. C'est une fierté et aussi une grande fragilité quand la sécheresse sévit. Or, le Brésil endure cette année la pire depuis cinquante ans. Les quelques gouttes tombées la semaine dernière ont ravivé les plants de café, mais n'ont pas suffi pour remplir les réservoirs, dont le niveau est au plus bas. Les centrales au charbon, au gaz ou au pétrole tournent à plein régime pour faire le joint. Certains économistes estiment que si l'économie du Brésil est à la peine, c'est en grande partie la faute de la météo. Le manque d'eau surenchérit le coût de l'électricité, mais aussi celui des fruits et légumes. Au marché, le prix des tomates a bondi de 20%. L'inflation est de l'ordre de 6%.

Quelles sont les solutions mises en place pour pallier ce déficit de courant ?

Dans l'urgence, le gouvernement puise dans les caisses de l'État pour soutenir les distributeurs de courant qui achètent l'électricité fournie au prix fort par les centrales thermiques. Cela coûtera cette année près de 4 milliards d'euros. De nouvelles taxes sur les sodas, la bière et des biens d'importations sont à l'étude pour financer ce plan anti-pénurie. Dilma Rousseff, qui avait imposé une baisse des tarifs de l'électricité pour les particuliers, paie aujourd'hui ses largesses et doit redistribuer des subventions aux producteurs afin qu'ils retrouvent les moyens d'investir dans des sources alternatives. Avec ces dépenses imprévues, le gouvernement aura sans doute du mal à tenir ses comptes à l'équilibre. C'est d'ailleurs les doutes sur les finances publiques qui ont conduit l'agence Standard and Poor's à dégrader la note souveraine du Brésil. Son triple B est maintenant assorti d'un « moins ». Car avec une croissance anémique, les recettes resteront figées. Mais les dépenses pourraient bien s'envoler. À cause du Mondial et des élections. En octobre, Dilma Rousseff joue sa réélection.

Des pannes pourraient nuire à sa réélection ?

Elle dispose aujourd'hui d'un capital confiance important auprès des électeurs, mais elle se souvient sans doute des conditions dans lesquelles Lula est arrivé au pouvoir. Au début des années 2000, le rationnement de l'électricité imposé suite à un épisode de sécheresse avait alimenté le mécontentement populaire et profité à Lula, alors dans l'opposition. C'est pourquoi les coupures préventives sont devenues politiquement incorrectes. Le rationnement est aussi contre-productif sur le plan économique, car quand un magasin ou une usine ferme faute d'électricité, c'est toute l'activité qui trinque. Dans l'immédiat, il faut surtout éviter de plomber un climat social délétère depuis la révolte contre la hausse des tickets de bus de juin 2013. Même le Mondial fait déprimer les Brésiliens. Selon un sondage publié en début de semaine, plus de la moitié d'entre eux, 54%, pensent que le Mondial 2014 sera au mieux moyen, sinon mauvais.

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