Comme la révolution, et contrairement à ce qu’il prétend, le capitalisme adore manger ses enfants. Sauf coup de théâtre, il n’y aura bientôt plus que trois opérateurs de télécommunications en France. Dans la nuit de vendredi à samedi, alors que les marchés aux actions étaient fermés en France, le groupe Bouygues a signé un accord avec son très honni concurrent, l’opérateur de télécommunications Free, en vue de vendre à ce dernier son réseau d'antennes et ses fréquences de téléphonie mobile. Et c’est Le Journal du Dimanche qui révèle cet accord que le JDD qualifie d’ « historique ». Montant de la transaction : 1,8 milliard d’euros. C’est le prix que Free est prêt à payer pour s’offrir les quelques 15 000 antennes et le portefeuille de fréquences de Bouygues Télécom.
Pour autant, la messe n’est pas encore tout à fait dite. Dans un entretien au Journal du Dimanche, Olivier Roussat, président de Bouygues Télécom, explique que cet accord avec Free est en effet « conditionné » à l’offre de fusion proposée par Bouygues à l’opérateur SFR, filiale du groupe Vivendi. Bouygues, en effet, veut avaler SFR, qui dispose de son propre réseau d’antennes et de ses fréquences. Or un opérateur qui possèderait deux réseaux se retrouverait en position dominante sur le marché. Un abus contraire à la loi. En revendant son réseau à Free, qui a justement besoin de s’en créer un digne de ce nom, Bouygues se conformerait à la réglementation. Et avec le milliard huit cents millions d’euros ainsi encaissé, pourrait plus facilement s’offrir ensuite le réseau de SFR.
Ainsi, deux ans après le déclanchement par Free de la guerre des prix dans les télécoms en France, guerre qui fut très profitable aux clients, l’armistice est signé comme le souhaitait le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, qui, dans un entretien au journal Le Parisien Dimanche, déclare qu’en France, dans le secteur des télécoms, « si on revient à trois, on est plus fort » (comprenez trois opérateurs). Pourquoi pas deux, pourquoi pas un ?
Sarko : éparpillé façon puzzle
C’est le nouveau feuilleton en France qui fait de l’ancien président « l’homme le plus écouté de France », lance Le Journal du Dimanche. Révélée par Le Monde, cette affaire, pour 44% des Français, a un « impact négatif » sur l’image de Nicolas Sarkozy, et pour 57% des sondés, sur l’image du personnel politique français, indique une enquête Ifop pour le JDD.
Alors, pour traiter ces affaires, à chacun son style. Et c’est plutôt à l’imaginaire collectif que Marianne fait cette semaine appel pour évoquer l’ancien président et son entourage.
Parodiant la scène de la cuisine du célèbre film, Les Tontons flingueurs, l’hebdomadaire publie en une un photomontage dans laquelle la tête de l’ancien président remplace celle de Monsieur Fernand, alias Lino Ventura, quand ce dernier est en train de beurrer des sandwichs ; le visage de l’ex-très écouté conseiller à l’Elysée Patrick Buisson trône en lieu et place de celui de Bernard Blier dans le film de Georges Lautner ; celui du président de l’UMP Jean-François Copé remplaçant le visage de Francis Blanche, tandis que la très photogénique Carla Bruni-Sarkozy se penche sur la table couverte de bouteilles, de verres et de billets de banque pour « toucher au grisbi ».
Et comme probablement rares sont encore les lecteurs de Marianne qui ignorent les répliques des Tontons flingueurs, le journal, en guise de titre en détourne justement une, en osant ce titre : « Ils osent tout… C’est même à ça qu’on les reconnaît ! »… Précision : dans la citation originale, signée Michel Audiard, ce n’est pas « ils osent tout » que lance Monsieur Fernand, le personnage campé par Lino Ventura dans Les Tontons flingueurs. C’est plutôt un mot grossier hélas malvenu à l’antenne qui s’écrit en quatre lettres, la première étant la lettre « c » et les suivantes étant les lettres « ons », je vous laisse deviner...
Alors, si, selon Marianne, Nicolas Sarkozy et ses proches « osent tout », et si c’est même « à ça qu’on les reconnait », c’est parce que la semaine qui s’achève a probablement tutoyé des records en termes « d’affaires » révélées par la presse en France.
Dans l’ordre, l’affaire Copé, accusé par Le Point d’être lié à une société de communication ayant facturé pour huit millions d’euros de marché de gré à gré au parti de droite UMP qu’il préside ; l’affaire Buisson, du nom du conseiller Patrick Buisson, qui, au moyen d’un magnétophone dissimulé dans ses vêtements, enregistrait des conversations dans l’entourage de Nicolas Sarkozy (affaire révélée à l’origine par Le Point, encore lui et confirmée cette semaine par Le Canard Enchaîné et le site Internet Atlantico) ; et, last but not least, l’affaire de la mise sur écoute de l’ancien président français, révélée avant-hier par Le Monde, dans le cadre d’une enquête judiciaire sur le présumé financement de la campagne électorale victorieuse de Nicolas Sarkozy en 2007 par la Libye de Kadhafi.
Ukraine : la Guerre de Troie n’aura pas lieu
La crise en Ukraine, sur quoi débouchera-t-elle ? Il est une issue sur laquelle L’Express, en tout cas, ne doute pas, celle de la « Troisième Guerre mondiale [qui] n’aura pas lieu ». Car si l’opinion publique accepte que des militaires professionnels « gendarment l’Afrique à grands risques, elle refuserait qu’on expose la jeunesse en attaquant des Russes ! ». D’autant plus que l’hebdomadaire émet des réserves sur les émeutiers de la place de l’Indépendance à Kiev, qui ont fait chuter le régime Ianoukovitch. « Passée l’ivresse révolutionnaire, il convient de tordre le cou à la vision romantique des événements qui veut faire prendre pour des Gavroche ceux qui ont dressé les barricades victorieuses de Maïdan », estime L’Express. Conclusion du journal : « Si ce pays, après d’autres, doit passer par la partition pour éviter la destruction, que cela advienne au moins par les urnes et non par les armes ». Et encore moins « par le fer et le sang », comme disait Bismarck.