Comment lutter contre le chômage sans croissance, le casse tête de la zone euro

En 2013 l'Europe a enfin tourné la page de la crise. En témoigne le rétablissement de l'Irlande qui depuis dimanche est officiellement sortie du programme d'assistance financière piloté par le FMI et l'Union européenne. L'Europe se porte mieux, mais la crise n'est pas finie pour autant, car la croissance est encore chétive et le chômage élevé, or les deux semblent indissociables.

La croissance vigoureuse est devenue le mantra des dirigeants occidentaux pour combattre le chômage, le cancer de la plupart des économies contemporaines. Aux États-Unis, et aussi au Royaume-Uni, les banques centrales ont décrété que la baisse du taux de chômage était l'indicateur clé pour déterminer la politique monétaire au service de la croissance. En France les experts estiment qu'il faut 1,5 point de croissance pour commencer à créer des emplois.

Or la France aura au mieux 0,1 de croissance cette année ! Au niveau de l'ensemble de la zone euro, la récession a bien été enterrée en 2013, mais le retour vers une croissance dynamique parait encore lointain. La zone euro se contentera d'une hausse de 1% de son produit intérieur brut en 2014, de 1,7% l'année suivante. A ce rythme, résorber rapidement le chômage qui concerne plus d'un actif sur 10 dans l'union monétaire ressemble à une mission impossible.

Les nouvelles technologies, levier de la croissance ?

L'Europe regarde avec envie du côté des États-Unis où naissent et s'épanouissent les géants de l'internet. Pourtant ils ne constituent pas les gisements de croissance et d'emplois qu'on imagine. Les champions du Nasdaq font des prouesses en bourse, mais l'économie américaine marche encore au ralenti. Les 2% de croissance américaine attendue pour 2014 peuvent faire rêver en Europe, mais on est loin des 4-5% enregistrés dans l'après-guerre. D'où le doute sur les promesses de la croissance numérique.

Pour retrouver une nouvelle phase d'expansion, l'humanité manquerait d'une innovation technologique motrice comme l'a été le chemin de fer au XIXe siècle. Cette thèse développée par l'économiste américain Robert Gordon est validée par les nouveaux penseurs de la sphère techno qui estiment que l'économie 2.0 détruit plus d'emplois qu'elle n'en crée. Parce qu'elle est surtout gourmande en main-d'œuvre hautement qualifiée, mais absolument pas intéressée par la cohorte des personnes dépourvues de qualifications qui sont les plus nombreuses à rechercher un travail.

Si la croissance reste aussi désespérante, il n'y a donc pas de voie pour lutter contre le chômage ?

La théorie sur l'épuisement de la croissance est séduisante intellectuellement, mais elle ne demande pas mieux que d’être infirmée par la réalité. Par ailleurs si le lien croissance-emploi est fort, il n'est pas toujours automatique. On voit par exemple que le Japon embourbé dans la stagnation depuis une décennie a néanmoins un chômage faible. On constate aussi que l'Allemagne s'est appauvrie pendant la crise tout en contenant le chômage. Si la croissance est en panne, il faut donc imaginer un plan B pour sortir de l'impasse.

La voie réformiste suggère de mieux partager le travail. L'autre voie proposée par un économiste libéral, l'américain Kenneth Roggof, c'est de réparer le moteur cassé en relançant les investissements dans les infrastructures. Réparer les routes, améliorer les réseaux électriques c'est ce que la commission demande à Berlin. Mais pour cela il faut mobiliser des fonds, ce que l'Europe peut commencer à se permettre maintenant qu'elle a assaini ses finances publiques.

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