L’énergie trop chère en France pour l’industrie chimique

La France est le pays européen où l'électricité est la moins chère, et c'est encore trop cher pour certains industriels, c'est le patron de la fédération de la chimie qui s'en plaint.

C'est un coup de gueule qu'a poussé la semaine dernière Philippe Goebel, le président de l'Union des industries chimiques, à la veille des journées de l'énergie organisées par le ministère de l'Ecologie. La chimie française globalement se porte bien. C'est l'un des principaux contributeurs positifs au commerce extérieur français.

C'est d'ailleurs grâce aux exportations que le chiffre d'affaires a cru en 2012 alors que la production est encore en léger recul par rapport aux années précédentes. Pour cette industrie dynamique, au 7e rang mondial, il est donc capital de rester compétitif. Et pour cela, elle surveille tous ses coûts, en particulier ceux de l'énergie, qui représentent 20% de son prix de revient.

La chimie absorbe le quart de l'énergie consommée par l'industrie française. Sous forme d'électricité pour faire tourner ses machines, et sous forme d'hydrocarbures comme matières premières. Or que constatent les chimistes depuis quelques années ? En Allemagne, où l'électricité est plus cher qu'en France, leurs concurrents paient leur électricité 30% de moins.

Un avantage qui repose uniquement sur des dispositions réglementaires. L'électricité nucléaire française est bien la moins chère d'Europe, mais Paris n'applique pas de régime de faveur pour l'industrie, ce que font les Allemands sans vergogne. De l'autre côté du Rhin, le courant qui alimente les électro intensifs est exempté de taxes sur le transport, d'où la ristourne qui dope la chimie allemande.

Berlin a choisi de faire peser sur les particuliers le coût de la transition énergétique et d'épargner les industriels, tandis que Paris répartit l'effort sur l'ensemble des consommateurs. Il n'y a pas que la chimie qui s'en plaint. Rio Tinto, par exemple a fermé son site de production d'aluminium de Saint-Jean-de-Maurienne, en Savoie, parce qu'il n'a pas réussi à obtenir un rabais d'EDF, ce qui lui a été accordé sans problème en Norvège par son fournisseur local d'électricité. 

Le gaz de schiste dope la chimie américaine

En revanche Paris ne peut pas faire grand chose pour faire baisser la facture pétrolière.
C'est d'ailleurs le prix du baril qui grève lourdement la balance commerciale française. Mais ce qui handicape la France, c'est le veto au gaz de schiste laissent entendre les chimistes qui regardent avec une pointe d'envie ce qui se se passe de l'autre côté de l'Atlantique.

Le gaz non conventionnel a bouleversé l'environnement de la chimie américaine. Aux Etats-Unis le gaz est trois fois moins cher qu'en Europe, beaucoup de compagnies ont donc relocalisé leur activité sur le sol américain. C'est cette concurrence là qui inquiètent les Français.

Le levier de croissance manquant

Le faible coût de l'énergie est un levier de croissance qui manque en Europe. C'est ce que laisse entrevoir l'expérience américaine où l'on s'attend à ce que la chimie fournisse la moitié de la croissance des années 2015 à 2020. Cette trajectoire toutefois n'est pas garantie. Entre autre parce que les autorités américaines commencent à réaliser que le schiste pourrait coûter cher à l'avenir sur le plan environnemental, de nouvelles taxes pourraient surrenchérir le prix du gaz.

Et puis les prix d'aujourd'hui ne sont pas assez rentables pour les producteurs de gaz, ils pourraient donc les faire remonter, soit en ralentissant l'extraction soit en exportant une partie sur les marchés extérieurs, mais pour cela il faut l'autorisation des autorités fédérales. Et c'est une équation difficile à résoudre. Quant à la France, si elle renonce au schiste, elle a au moins la possibilité d'aménager le tarif de l'électricité, cela fait partie du débat sur la fameuse transition énergétique.
 

Partager :