On a ces derniers temps beaucoup parlé des dépôts russes dans les banques chypriotes. Ils sont effectivement très importants. Ce que l'on réalise aujourd'hui et ce dont les Russes ne se sont pas trop vantés jusqu'à maintenant - c'est pourtant une information publique - c'est que Chypre est aussi leur premier investisseur étranger. L'argent injecté par la petite île méditerranéenne dans l'économie du grand frère orthodoxe entre 2007 et 2010 représente presque trois fois (2,7 pour être précis) les sommes investies par l'Allemagne pendant la même période.
L'île, qui n'a que des plages et des banques selon le raccourci d’un ministre suédois, s'est trouvé une vocation fort lucrative en devenant une plate-forme d'allers-retours pour les capitaux russes. Et visiblement cela arrange tout le monde. Il n'y a pas que les grandes fortunes douteuses qui ont ouvert des comptes à Nicosie, mais aussi des entreprises russes avec pignon sur rue, soucieuse d'optimisation fiscale, entendez par là, une façon d'échapper à l'impôt sur le sol russe. L'argent est donc déposé à Chypre, puis il repart via une société écran vers la Russie.
C'est pourquoi le premier ministre Dimitri Medvedev a regretté hier que les entreprises de son pays voient leur activité entravée par la fermeture actuelle des banques chypriotes. Le cadre fiscal est plus que bienveillant pour cette clientèle : non seulement l'impôt sur les sociétés est l'un des plus faibles de la zone euro, mais de surcroît Russes et Chypriotes ont signé, il y a 15 ans, une convention fiscale bilatérale très avantageuse pour les deux parties. Elle permet d'éviter la double imposition. Cette convention, il est vrai, devrait être plus restrictive à partir de l'année prochaine.
Les Russes cherchent à protéger ce système de carrousel
Les Russes et les Chypriotes ! Car Nicosie n'a pas l'intention de renoncer à son statut d'intermédiaire financier. C'est pourquoi le président Anastasiades a préféré dans un premier temps sacrifier les petits épargnants de son pays et imposer tous les comptes plutôt que de taxer lourdement les seuls comptes ouverts par des étrangers. L'île veut sauver son système bancaire pour continuer les affaires comme par le passé. Moscou a déjà donné un coup de pouce à son gracieux partenaire avec un prêt de deux milliards et demi d'euros en 2011. Renouveler l'opération est impossible, Bruxelles s'y oppose car cela ne ferait qu'aggraver l'état des finances de l'île. En revanche Moscou pourrait prendre des participations dans les banques les plus mal en point.
Moscou intéressé par le gaz chypriote
C'est vrai que les Russes s'intéressent aussi au gaz chypriote. Dès l'annonce du plan européen, des rumeurs ont circulé évoquant la soudaine attention de la banque de Gazprom, le géant russe du gaz, prête à offrir des facilités à Chypre en échange d'une licence d'exploration dans les eaux territoriales chypriotes où sont enfouies les hydrocarbures.
Mais Nicosie n'a pas intérêt à un tel montage car l'île espère bien devenir un concurrent de la Russie sur le marché du gaz dans la fourniture à l'Europe par exemple. C'est pourquoi le gouvernement chypriote marche aujourd'hui sur des oeufs : il lui faut à la fois satisfaire son actuel gros client bancaire, la Russie, tout en restant en bons termes avec ses partenaires européens, entre autre parce qu'ils pourraient être un débouché d'avenir pour ses vastes réserves de gaz.
En bref dans l'économie
La hausse de l'essence a profité au chemin de fer allemand
Le nombre de passagers de la Deutsche Bahn a augmenté de 49 millions l'année dernière. Cette hausse de 2,5 % sur un an a fait gonfler les bénéfices de la compagnie allemande. L'entreprise publique souligne que le transport par rail a davantage progressé que le transport aérien.