ERDF est en Sibérie pour faire son métier, c'est-à-dire distribuer le courant à environ 200 000 clients, foyers ou entreprises, sur un territoire grand comme les deux tiers de la France. Dans cette région extrême à plus d’un titre, avec des températures qui oscillent entre - et + 40 degrés entre l'hiver et l'été, acheminer le courant est déjà en soi un défi technique. Défi que les Russes relèvent ave plus ou moins de bonheur depuis des décennies.
En revanche, dans la gestion quotidienne, beaucoup reste à faire, les impayés, le courant perdu, les problèmes de sécurité grèvent lourdement les comptes de la société publique locale. C’est pourquoi l’équivalent russe d’ERDF, la société publique MRSK, qui cherche à améliorer les performances de ces succursales à travers tout le pays a confié à ERDF la gestion déléguée de la distribution du courant pour la région de Tomsk.
Deux expatriés d’ERDF ont pris les rennes de l'entreprise à Tomsk même il y a un an. D'autres viennent pour des missions ponctuelles et une équipe assure le suivi avec la maison mère à Moscou. C’est une première. Jamais auparavant la direction d'une entreprise russe relevant d'un domaine aussi stratégique que celui de l'électricité n'avait été confiée à une société étrangère. Ce partenariat très politique a été signé avec le feu vert du président Poutine, et sa réalisation est surveillée de près par le Kremlin.
ERDF : une vocation internationale ?
ERDF a toujours eu une activité à l'étranger, mais plutôt sur le mode de la coopération ou de la solidarité en cas d'avanies majeures, comme lorsqu'il y a eu le tsunami au Japon. Ce qui est nouveau c'est que le groupe entend bien valoriser son savoir faire, il s'est aperçu que son expérience éprouvée, par exemple dans les interventions rapides ou bien dans la réparation d'une ligne sans coupure de courant, et bien sûr dans la gestion, sont des atouts qui intéressent d'autres compagnies.
Pour le moment le chiffre d'affaire n'est pas significatif. L'activité internationale d'ERDF se développe un peu comme celle d’une start up, avec une équipe réduite mais un fort potentiel de développement. Son objectif : décrocher des contrats de gestion sur le long terme. Si l’expérience de Tomsk est couronnée de succès ce sera alors la vitrine de cette activité lucrative, le transfert de compétence. Car la société publique française n’investit pas -le réseau ne lui appartient pas, elle n’a pas à immobiliser du capital pour l’améliorer.
En Russie, la filiale compte bien tirer partie de la vaste réorganisation du secteur en cours pour décrocher d’autres contrats de délégation de gestion lorsque le secteur sera totalement libéralisé, en 2014. Mais tout cela dépendra de l’évolution du cadre législatif, des jeux de pouvoir entre les différents acteurs locaux du secteur.
ERDF met le cap à l’est
La filiale russe d'ERDF s'appelle ERDF Vostok., ce qui signifie « l'est ». L'orient, c'est un peu la nouvelle frontière du groupe. Deux contrats ont été signés l'année dernière au Liban pour distribuer l'électricité sur les deux tiers du territoire. ERDF concentre ses efforts de prospection sur 4 pays cibles : hormis la Russie, la Chine, la Turquie et enfin le Brésil, qui, bien qu’au sud, a également le profil d’un pays prometteur. Et puis bien sûr la filiale internationale d’ERDF continue à remplir sa mission historique en Afrique, au Maroc et en Côte d’Ivoire notamment ainsi que dans tous les pays qui la sollicitent ponctuellement.
A signaler enfin un effet d'entrainement pas négligeable dans cette aventure siberienne : le distributeur français d'électricité qui n'est pas fabricant propose à ses partenaires russes les produits électriques, les compteurs par exemple des PME françaises qui pourraient trouver là une courroie de transmission pour se développer à l'international.