L'année dernière, Manuel Valls était venu leur crier son amour des entreprises. Mais cette année, le gouvernement a repris ses distances avec les patrons français. Car la politique très favorable aux employeurs, mise en place pour inverser la courbe du chômage, n'a pas encore donné de résultat concret sur le marché de l'emploi. Les membres du Medef redoutent donc qu'une partie des allégements de charges inscrits dans le pacte de responsabilité ne soient supprimés.
Et selon l’économiste Jean-Marc Daniel, ils ont de bonnes raisons de se méfier. « La ligne directrice du gouvernement et de sa majorité est assez floue encore, juge l’économiste de tendance libérale. Manuel Valls n’arrête pas de prendre des engagements et, en même temps, il a signé la motion du congrès du Parti socialiste qui demandait que 15 milliards de ce pacte soient réorientés vers les ménages. Donc, il y a une défiance à l’égard de la parole politique, et on peut penser que l’approche des élections la rendra encore plus incertaine. »
L'objectif d'un million d'emplois ne sera pas atteint
Dans une tribune publiée au début de la semaine par Les Echos, le Premier ministre Manuel Valls veut rassurer les patrons. Il leur promet de tenir les allègements de charges, mais il leur demande aussi de respecter leurs engagements, c'est-à-dire d'embaucher.
Pierre Gattaz, le patron du Medef, avait d'ailleurs garanti la création d'un million d'emplois. C'était inscrit sur le fameux pin's jaune qu'il portait à la boutonnière. Mais, d'après un sondage publié par Le Figaro, seulement 11 % des employeurs prévoient cet automne l'embauche d'un salarié.
Pour le chercheur François-Xavier Dudouet, les deux parties ont en fait échoué. « Le Medef est incapable de remplir sa part du contrat. Il n’arrive pas à créer d’emplois. Le gouvernement est engagé dans cette politique et ils ne peuvent pas faire marche arrière, sauf à se déjuger. Tous les deux sont pris dans un jeu de dupes, où ils sont obligés de se renvoyer la balle », juge-t-il.
Manuel Valls promet une refonte du code du travail
Derrière ce jeu de rôles, patrons et gouvernement se rejoignent pourtant sur la poursuite des réformes. Pierre Gattaz estime qu'il reste six mois pour accomplir les réformes, car ensuite la France sera accaparée par le scrutin présidentiel de 2017.
Manuel Valls le caresse dans le sens du poil en confirmant dans sa tribune qu'il faudra revoir le code du travail, devenu « trop complexe ». Une perspective rassurante pour le Medef, analyse Jean-Marc Daniel, qui juge que « le gouvernement prend conscience que la gestion de l’entreprise n’est pas seulement un problème financier, mais tout un ensemble de contraintes qui rendent la création et la gestion de l’entreprise très difficile à assumer ».
Parler des jeunes pour éviter de parler de l'emploi
La jeunesse est le thème officiel de cette université d'été. Avec un slogan qui claque : « Formidable jeunesse ». On va bien sûr parler formation, mais aussi emploi, car les perspectives de cette classe d'âge sont tout sauf formidable : 25 % des jeunes Français sont au chômage.
Selon François-Xavier Dudouet, « c'est une manière de ne pas parler d'emplois ». Mais le chômage sera bien le sujet numéro un de cette université d'été du Medef. Un sujet très sensible. Trop, peut-être, pour la classe politique française ? Ni la gauche au pouvoir, ni la droite dans l'opposition, n'envoient beaucoup de représentants à cette édition 2015.
Seulement cinq ministres sont invités. Ils étaient onze en 2012, au début du quinquennat de François Hollande. En revanche, des premières dames font le déplacement. La reine Rania de Jordanie ouvre le bal, ce mercredi, et la première dame de Côte d'Ivoire sera l'hôte de marque de la journée de jeudi.