Le vrai problème de Chypre n’est pas son endettement public, mais les erreurs de ses banques. Comme cela s'est produit en Irlande ou en Islande, elles sont devenues tellement grosses que leur faillite n'est pas supportable pour l'île. Leurs dépôts représentent six fois le PIB chypriote. La faillite est pourtant ce qui les attend si rien n'est fait, car elles ont multiplié les opérations hasardeuses.
Peu regardantes sur l'origine des fonds, elles ont accueilli les clients du monde entier avec une bienveillance particulière pour les nouveaux riches russes aux portefeuilles bien garnis. Et surtout, elles ont réinvesti ces milliards dans de la dette grecque. Cela leur a fait gagner de l'argent en 2009, mais en 2010, cette stratégie se retourne contre elles. La situation commence à se gâter. Car cette dette grecque, dont plus personne ne voulait, a fini par être restructurée, devenant au printemps 2012 le problème des banques chypriotes.
En juin, Nicosie demande le soutien de l'Union européenne. Pourquoi l'Europe tarde-t-elle à lui répondre ?
Dans un premier temps, c'est le président chypriote qui a fait de la résistance. Pour cet élu d'obédience communiste, pas question d'accepter la cure d'austérité imposée par les institutions internationales en échange d'un dispositif de sauvetage. Pas question par exemple de privatiser. Ces derniers temps, c'est en Allemagne que le climat s'est durci. Venir à l'aide de Nicosie ferait peser sur le dos du contribuable européen, et allemand en particulier, le renflouement des milliardaires russes qui ont placé leur argent à Chypre. Intenable politiquement. En cette année électorale, les sociaux-démocrates en font une ligne blanche et Angela Merkel n'a pas besoin de forcer son naturel pour s'y tenir.
Qu'est-ce qui peut débloquer le dossier ?
L'élection présidentielle chypriote d'abord, qui aura lieu à la mi-février et qui devrait voir
arriver au pouvoir un homme de centre droit mieux disposé à l'égard des institutions
financières que l'actuel président.
Dans l'immédiat, il faut d'abord évaluer avec exactitude le besoin de financement des banques. S'il est de l'ordre de dix milliards d'euros comme le laisse entendre le fonds Pimco sollicité pour l’expertise par la commission, un plan de sauvetage ferait exploser la dette de l'Etat chypriote, une option dont ne veulent ni la chancelière allemande ni le FMI. Mais le gouvernement chypriote conteste les chiffres de Pimco qui circulent déjà à Nicosie et espère bien convaincre ses partenaires que ses besoins sont moindres et donc supportables pour l'équilibre de ses comptes.