Créé en mai 2010, après le premier sauvetage de la Grèce, le FESF devait surtout être un instrument de dissuasion… pour que sa force de frappe ne soit jamais utilisée. Au fur et à mesure de l’aggravation de la crise les Européens se sont rendu compte que non seulement le Fonds n’était pas suffisant pour aider la Grèce, mais qu’il devait accroître son enveloppe pour préparer le terrain à d’autres aides d’envergures possibles à l’Italie et, peut-être, à l’Espagne. La décision a donc été prise de doter le FESF d’un mécanisme permettant mobiliser davantage de fonds, sans que les Etats ne dépensent plus. C’est le fameux « effet de levier ». Qu’est-ce que cela veut dire en pratique ?
Un garant des emprunts
Sa capacité d’intervention démultipliée, le Fonds de secours servira de garant aux investisseurs pour les inciter à acheter de la dette publique d’Etats fragiles. On cautionnera ainsi les émissions d’obligations par ces Etats. La garantie concernera une partie de la dette, entre 20 et 25% probablement. A ce dispositif sera ajouté un fonds spécial, qui pourrait accueillir les contributions des pays émergents, comme la Chine, la Russie ou le Brésil, et même de l’extérieur de la zone euro, comme le Japon. Le fait de l’adosser au FMI a beaucoup rassuré les Chinois. La contribution des BRICS est un sujet politiquement très sensible, car une contrepartie sera sûrement demandée en échange. C’est pourquoi ce dernier volet reste encore à chiffrer.
« Monsieur Euro »
Les dirigeants européens ont insisté sur la nécessité d’une réforme de la gouvernance de la zone euro. Le Fonds de stabilité à puissance démultipliée aura donc son « Monsieur Euro ». C’est le Finlandais Olli Rehn, actuellement commissaire aux Affaires économiques, qui aura désormais, en plus, la charge des affaires liées à l’euro (lire encadré). Une nomination qui pourrait préfigurer un jour un portefeuille de ministre européen des Finances.
La contribution des BRICS
La Chine et la Russie ont fait état de leur intérêt à aider la zone euro. Le Japon a également promis sa contribution car « une Europe stable est dans l’intérêt de notre pays », a estimé le ministre des Finances nippon, Jun Azumi. Dans un entretien téléphonique avec son homologue français Nicolas Sarkozy, le président chinois Hu Jintao a espéré que l’accord signé à Bruxelles « aidera à stabiliser les marchés financiers ». L'Europe est le premier partenaire commercial de la Chine, devant les Etats-Unis, et ce sont les exportations qui tirent la croissance de ce pays. Mais depuis deux ans les commandes européennes sont en baisse et Pékin voit ses ventes à l'export diminuer. De plus, la zone euro est l'une des régions les plus importantes d'investissement des Chinois. Mais voir son client tomber malade n’est pas bon pour les affaires. Les Chinois ont tout intérêt d’aider la zone euro. Mais ils ne vont pas le faire les yeux fermés.
Faut-il avoir peur que la Chine s’approprie la dette souveraine des Etats européens ? Selon les experts français et allemands, elle détiendrait d'ores et déjà quelque 500 milliards de dollars de dette publique européenne. Elle souhaiterait actuellement diversifier ses 3 200 milliards de dollars de réserves de change, essentiellement libellées en dollars.
Soutien de la BCE
Et la Banque centrale européenne dans tout cela ? Craignant l’inflation, l’Allemagne s’est refusée à la transformation du FESF en banque, ce que demandait la France, qui aurait permis au Fonds de sauvetage de disposer d’accès aux ressources illimités de la BCE. L’effet de levier attendu du Fonds de stabilité n’exclut pas la poursuite du soutien de la BCE aux pays fragilisés de la zone euro. Actuellement, elle maintient à flot l’Italie et l’Espagne en rachetant leur dette publique sur les marchés pour éviter que leurs taux obligataires ne s’envolent. L’Italien Mario Draghi, qui doit succéder début novembre à Jean-Claude Trichet, a signifié qu’il poursuivrait sur la même voie des mesures « non-conventionnelles » face à la crise.