«Mon Bataclan», le récit graphique du rescapé Fred Dewilde

Depuis ce matin, les hommages se multiplient en souvenir des attentats qui ont frappé Paris le 13 novembre dernier. Parmi les témoignages, celui d'un des rescapés de la tuerie du Bataclan, Fred Dewilde, 49 ans. Il vient de publier « Mon Bataclan », un récit graphique.

Quand les mots n'ont plus suffi, Fred Dewilde, graphiste de formation, a pris son crayon. Des dessins en noir et blanc pour raconter la nuit d'horreur. Les coups de feu, le concert interrompu, les cris, la panique, lui-même jeté au sol auprès d'une autre victime. Des images de détresse qui pourtant évitent de montrer la violence frontalement.

Deux petits détails

« La seule chose que je trouve vraiment violente et que j’ai montrée, c’était ce petit morceau de viande et cette tête d’os qui se trouvaient devant nous, raconte Fred Dewilde, la voix tremblante. Mais je trouve que cela donne une tonalité. On comprend tout le reste, tout ce qui est autour, toute l’horreur, à travers ces deux petits détails. Quand j’ai réussi à dessiner cela, c’était déjà un pas énorme par rapport à tout cela. »

Pour représenter les terroristes, Fred Dewilde a choisi de dessiner des squelettes, sans visage ni chair comme s'ils étaient les cavaliers de l'Apocalypse : « Eh ben, oui, ils sont déjà morts à l’intérieur. Maintenant, il y a d’autres symboliques que je vois. Cet aspect « envoyé de Dieu » que je n’ai absolument pas vu au moment où je les ai dessinés. Pour moi, ils apportaient simplement la mort. »

Le retour à la vie après le Bataclan

Après la fin de l'assaut, Mon Bataclan raconte, sous forme de récit cette fois, le retour à la vie de Fred Dewilde : difficile, douloureux, compliqué. Un quotidien rythmé par le traumatisme. Avec de tels souvenirs, peut-il encore écouter la musique des Eagles of Death Metal, le groupe qui se produisait sur scène le 13 novembre ?

« J’ai réécouté l’album, j’ai réécouté le concert à l’Olympia. Cela ne pose pas de problème. Pour moi, les choses ne sont pas rassemblées, il ne faut pas tout mélanger. Ce concert, c’est un moment. La douleur n’est pas associée à la musique, mais au terrorisme, aux armes à feu, à la guerre, mais pas à la musique en soi. »

Tourner une page

Avec ce livre, Fred Dewilde dit avoir réussi à tourner une page : « le dessin, le livre, cela a apporté ses fruits à tous les niveaux. Moi, cela m’a fait du bien. L’objet est sorti, l’objet palpable. La présentation et les retours que j’ai eus de la part des survivants m’ont fait dire que j’avais eu raison d’aller jusqu’au bout. Au tout début, j’avais envie d’aller jusqu’au bout pour moi, ensuite pour eux aussi. C’est le plus beau des compliments que je pouvais avoir, c’est le plus beau des cadeaux : cela porte ses fruits. Donc, pour le moment, je vais bien. »

Envisage-t-il pour autant de retourner au Bataclan pour les commémorations ? « Non, non, non. Le Bataclan, si j’y retourne, je pense que cela ne sera pas pour tout de suite. »

Fred Dewilde : Mon Bataclan, publié chez Lemieux Éditeur

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