Le Festival d’Udine rend hommage au «Jerry Lewis hong-kongais» Michael Hui

Le 13e Festival du cinéma populaire asiatique d'Udine, dans le Nord-Est de l'Italie (29 avril-7 mai 2011), rend un vibrant hommage à Michael Hui, le roi de la comédie hong-kongaise, en projetant plusieurs de ses films et en lui décernant un prix spécial pour l'ensemble de son œuvre.

De notre envoyé spécial à Udine

Il a fait rire des générations de Chinois. Et ici, à Udine, le public l’acclame et demande à revoir ses films. Pourtant, Michael Hui n’était pas prédestiné à devenir une vedette. « Je suis devenu acteur par hasard. Lorsque j’étais étudiant en sociologie, je travaillais à temps partiel pour une chaîne de télévision afin de payer mes cours. Un jour, le producteur m'avait demandé si je pouvais interpréter un sketch. Je l’ai fait et les gens ont beaucoup aimé. J’ai donc continué sur la lancée », raconte-t-il.

En 1972, les célèbres studios Shaw Brothers décident de confier à Michael Hui - devenu entre temps un présentateur comique populaire à la télévision hong-kongaise - le rôle titre dans The Warlord, une comédie noire à gros budget dirigée par Li Han-hsiang. La performance artistique de Michael Hui, l’homme aux mille grimaces, contribue à propulser le film en haut du box office.

Deux ans plus tard, il écrit, réalise et joue le personnage principal dans Games Gamblers Play, une comédie sur une passion locale : les jeux d'argent. Ce premier long métrage remporte un franc succès. Michael Hui enchaîne ensuite les rôles, soit en tant qu'acteur-réalisateur, soit en tant qu'interprète ou scénariste pour d'autres metteurs en scène. Des films qui feront de lui un cinéaste clé de l’ancienne colonie britannique.

« La comédie n’a pas de frontière »

Admirateur du maître japonais Akira Kurosawa, qui s’inscrit pourtant dans un tout autre registre que le sien, Michael Hui, pour qui « la comédie n’a pas de frontière », est fan de Charlie Chaplin, Harold Lloyd et Billy Wilder. Ces « classiques » l’ont influencé. Il aime aussi Jim Carey, Bud Spencer, Mike Myers (alias Austin Powers), et spécialement Woody Allen car ce dernier « utilise sa personnalité pour écrire ses propres scénarios ». Mais c’est avant tout en observant tout ce qui l’entoure qu’il puise son inspiration. « J’essaie toujours de trouver des angles drôles dans toutes les situations », dit-il. « La vie est telle une tragédie et la comédie en est le meilleur remède. Vous pouvez choisir de voir la vie du côté plaisant ou triste. Moi, je préfère la première option ».

Ce choix se traduit par des films hilarants du début à la fin et qui peuvent être regardés sans sous-titrage grâce à un soin particulier apporté à l'aspect visuel. « Le visuel est bien plus important que les dialogues. Les émotions que vous faites passer à travers votre visage comptent énormément, car au final le rire aux éclats est le même partout dans le monde », souligne-t-il. Dans ses œuvres, plus loufoques les unes que les autres, le « Jerry Lewis hong-kongais » multiplie grimaces et suites de gags avec un minimum de temps mort, au risque de pécher parfois par une certaine lourdeur.

Une satire sociale

Michael Hui produit des comédies à succès, certes, mais dans lesquelles il aime mettre en lumière la condition sociale des travailleurs. Un intérêt qui pourrait s’expliquer par ses origines modestes et qui se manifeste notamment dans The Private Eyes (1976), une satire sociale où il campe avec brio un patron avare et arrogant d’une agence de détectives privés. « Le social fait naturellement partie de mes films. Je suis né [en 1942 à Guangzhou] dans une famille pauvre. Mon père était exploité par son patron. J'ai vu tout cela et, en grandissant, j'ai détesté les patrons. J’ai logiquement écrit des histoires sur l’exploitation des travailleurs en exagérant bien sûr les traits de caractère des dirigeants d’entreprise », confie-t-il. « A travers les personnages que j’incarne, j’essaie de faire ressortir les faiblesses humaines comme la vanité ou l’avarice. Et c'est ce qui provoque le rire chez les spectateurs ».

« Mieux vaut quitter ce monde en riant »

Michael Hui (Michael Hui Koon-man de son vrai nom) n’a plus tourné de films depuis The Magic Touch en 1992. A 69 ans, le roi de la comédie hong-kongaise veut repasser derrière la caméra. « Depuis la rétrocession de Hong-Kong à la Chine populaire en 1997, tellement de choses ont changé. Il y a beaucoup de manifestations, par exemple. Eh bien je projette de me saisir de tout ce mécontentement pour en faire... une comédie », explique-t-il.

Mais en fait, qui est vraiment Michael Hui ? Est-il aussi drôle dans la vie qu’à l’écran ? « Je ne suis pas vraiment très drôle dans la vie. Je suis ce que je suis sans savoir exactement qui je suis. J’essaie de mettre un peu de gaîté partout où cela est possible. La vie est tellement triste. Nous ne savons pas d’où nous venons, ce que nous sommes et où nous allons. Et comme nous devons tous mourir un jour, mieux vaut quitter ce monde en riant. En ce sens, vous pouvez dire que je suis fou », conclut-il, fidèle à lui-même jusqu’au bout.

Le 13e Festival du cinéma populaire asiatique d'Udine, du 29 avril jusqu’au 7 mai 2011.

 

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