Les Français devront travailler plus pour prendre leur retraite

Sur la réforme des retraites il n’y a pas encore de version officielle de la part du gouvernement français. L’annonce est attendue pour la fin du mois de juin. Un projet de loi verra le jour d'ici juillet et il sera adopté à l’automne. Mais la communication gouvernementale a laissé entrevoir les principales orientations qui le guideront dans la réforme.

A défaut de pouvoir rendre ses arbitrages avant fin juin, le gouvernement a souhaité rassurer les Français au cours de cette période de réflexion sur un point crucial : le système de retraites par répartition ne sera pas remis en question.

Mais ce système qui repose sur la solidarité entre les générations, à l’inverse du système par capitalisation où chacun cotise pour soi, est à bout de souffle. En France, de moins en moins d'actifs cotisent pour de plus en plus de retraités. A la fin des années 2000 arrivent à la retraite les générations nombreuses du baby-boom nées au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. En l’an 2000, les plus de 60 ans représentaient 20,6% de la population. Leur proportion passera à 33,5% en 2040. Ils seront alors plus nombreux que les moins de 20 ans. Pendant ce temps l'espérance de vie augmente sans cesse, soit plus de six ans depuis le début des années quatre-vingt. Face à ce vieillissement, le nombre d’actifs qui soutient le système de retraites par répartition deviendra de plus en plus insuffisant. Si en 1960, il y avait 4 actifs pour financer un retraité, actuellement on compte 1,7 d’actifs pour un retraité.

Cette évolution démographique était prévisible depuis longtemps. On savait qu’à partir de 2030, le système des retraites serait en déficit. Le gouvernement socialiste de Lionel Jospin (1997-2002) avait d’ailleurs commencé à constituer un Fonds de réserve des retraites pour servir de « bas de laine » durant les années les plus difficiles. Mais, chose inattendue, c’est dès 2010, que la France a connu le niveau de déficit redouté pour 2030, selon l’aveu même du président de la République. Nicolas Sarkozy faisait récemment cette déclaration : « Dès cette année, le déficit des retraites, tous régimes confondus, devrait avoisiner 30 milliards d'euros. C'était le niveau qu'on pensait atteindre dans vingt ans. La crise a rapproché le mur de vingt ans ».

Trouver des ressources nouvelles

Le régime de retraite par répartition n'est structurellement plus viable avec ses paramètres actuels. C’est le COR, le Conseil d'orientation des retraites, qui tire la sonnette d’alarme. Le gouvernement doit trouver des ressources nouvelles pour à la fois éponger le déficit des retraites et leur assurer un financement durable, du moins sur le moyen terme.

Dans un document d'orientation sur la réforme des retraites remis aux syndicats le 18 mai dernier, le ministre du travail Eric Woerth a lancé comme pistes de réflexion d’une part l’allongement de la durée des cotisations et, d’autre part, l’augmentation des recettes.

Même si ce n’est pas officiel, le gouvernement envisage ainsi de faire travailler les Français plus longtemps. Il s’agirait de décaler progressivement dans le temps l’âge auquel il sera possible de prendre sa retraite. Aucune limite n'a encore été fixée. Plusieurs médias en France en citant des responsables syndicalistes qui ont rencontré le ministre, assurent que le recul de l'âge de départ à la retraite, de 60 ans aujourd’hui, aurait lieu progressivement à partir de janvier 2011, passant à 62 ou à 63 ans. De même, les médias avancent que la durée de cotisation nécessaire pour toucher une retraite à taux plein – il faudra 41 ans en 2012- va être également allongée. Le gouvernement ne cesse de démentir mais pas les plus hauts responsables du parti au pouvoir, l’UMP. « Nous sommes tous à peu près d'accord : il faut absolument jouer sur la durée de cotisations et sur l'âge légal de départ à la retraite », ont ainsi déclaré les porte-parole de l'UMP lors de la convention sur les retraites organisée par le parti.

Outre le levier démographique, celui des recettes nouvelles sera également actionné pour pérenniser le financement des retraites. Là-dessus le gouvernement a été plus clair en annonçant la mise en place d'une contribution supplémentaire de solidarité sur les hauts revenus et les revenus du capital, dont les détails seront précisés dans le projet de réforme.

Mais cette nouvelle source de recettes risque cependant d’être largement insuffisante face aux défis que pose le financement des retraites. Comme le gouvernement exclue toute hausse générale des prélèvements obligatoires ou des cotisations sociales, il laisse entendre que la réforme des retraites privilégiera les transferts de ressources. Les entreprises et les salariés pourront par exemple cotiser moins pour le chômage et plus pour les retraites. Là-dessus aussi, les détails ne seront connus qu’à la fin du mois de juin.

Les Français et la réforme des retraites

Les derniers sondages montrent que les Français plébiscitent (à 82%) les augmentations d’impôts pour financer les retraites mais uniquement sur les revenus des plus riches. Ils souhaitent même (à 73,7%) que l'on « décrète un impôt spécial sur les banques ». Ils sont en revanche opposés à la hausse généralisée de la TVA. Parmi les cadres, près de deux  interrogés sur trois estiment qu'il faut repousser le moment de partir à la retraite. Une grande majorité d'entre eux (73%) est favorable à un allongement de la durée des cotisations plutôt qu'à un recul de l'âge légal (39%).

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