Le Sud-Coréen Lee Changdong à nouveau en compétition à Cannes avec « Poetry »

Projection ce mercredi 19 mai du quatrième film asiatique en course pour la Palme d’or : Poetry, du Sud-Coréen Lee Changdong, un habitué du Festival de Cannes. Comme l’indique son titre, le film a pour thème central la poésie, un genre littéraire « à l’agonie », selon son réalisateur.

De notre envoyé spécial à Cannes

« Nous vivons une époque où la poésie se meurt. Dans mon film, je voulais aborder la nature de la poésie, comprendre ce qui fait que la poésie devienne poésie et ce qui nous attire vers elle », affirme Lee Changdong.

Pour cette 63e édition, le cinéaste sud-coréen revient sur la Croisette avec Poetry, après avoir présenté en compétition officielle en 2007 Secret Sunshine, qui a permis à l’actrice principale Jeon Doyeon de remporter le prix d’interprétation féminine. Il était aussi membre du jury à Cannes l’année dernière.

« Une beauté insaisissable »
 

« La poésie est bien plus qu’un genre littéraire. De l’ordre de l’invisible, elle reflète la vie et recèle une beauté insaisissable. Le film est le résultat de ma réflexion sur ce genre littéraire », dit Lee Changdond, qui associe la poésie au personnage principal du film.

Mija vit dans une petite ville de province. Sexagénaire, elle élève seule son petit-fils. L’adolescent difficile incarne l’instabilité et l’incertitude qui caractérisent les jeunes de son âge. Aide-ménagère, Mija travaille chez un riche vieillard hémiplégique qu’elle soigne et qu’elle appelle « Président ». Le cours de sa vie change quand elle apprend qu’elle est atteinte d’Alzheimer.

Mais bizarrement, c’est au moment où elle commence à oublier les mots qu’elle décide d’apprendre à écrire des poèmes pour la première fois de sa vie. Elle participe à un atelier d’écriture et fréquente un club de lecture. Grâces aux vers, elle retrouve le goût de la vie, soigne son apparence, n’hésitant pas à arborer des chapeaux à motifs floraux et des tenues aux couleurs vives.

Vedette légendaire
 

Le rôle de Mija est interprété par Yun Junghee, actrice populaire aux 330 films qui avait fait ses débuts en 1966. Elle formait avec deux autres comédiennes un trio qui régnait sur l’âge d’or du cinéma coréen dans les années 1960. La vedette légendaire, lauréate de plusieurs prix d’interprétation, était absente des plateaux de tournage depuis seize ans, refusant de multiples propositions , avant d’être convaincue par le scénario de Lee Changdong. 

L’actrice s’identifie même au personnage, Mija, sexagénaire tout comme elle, mais dont la candeur reste intacte. « Mija est innocente, rêveuse, fantasque et un peu décalée comme moi. Je n’ai donc pas eu de difficulté à camper son personnage », explique Yun Junghee dont le vrai prénom est Mija, comme l’héroïne, une pure coïncidence.

Dans ce film sobre, la poésie fait oublier les difficultés de la vie quotidienne. Poetry était pourtant un projet risqué financièrement, en particulier pour son producteur Lee Joondong, à l’heure où le cinéma de diverstissement éclipse les films plus ambitieux. Un défi relevé avec brio par Lee Changdong, diplômé de langue et littérature coréennes, ministre de la Culture de 2002 à 2004, qui a réussi avec bonheur à mettre la poésie en scène.

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