Avec notre correspondant à Bangkok, Arnaud Dubus
Le quartier de Ratchaprarop est dévasté. Au milieu de la rue, deux camions poubelles brûlent. Des volutes noires s’échappent de tas de pneus enflammés. Une agence bancaire, attaquée dans la nuit, fait hurler son signal d’alarme à n’en plus finir. Les distributeurs de billets ont été pillés.
Ratchaprarop a été déclaré « zone de tirs à vue » par les militaires le 15 mai en fin d’après-midi. Les affrontements entre manifestants et soldats y ont duré toute la nuit, ponctués par des explosions et des rafales de fusils d’assaut. De rares manifestants continuent toutefois à harceler les militaires avec des lance-pierres. De temps à autre claque le bruit sec d’un coup de feu.
Les militaires n’ont toujours pas attaqué le camp retranché des « chemises rouges » dans le centre-ville. Ce dimanche matin, seules quelques centaines de manifestants continuent à écouter les discours de plus en plus enflammés des leaders du mouvement, signe de ce que le blocus organisé par l’armée a un certain effet.
Le gouvernement n’en a pas moins décidé de reporter d’une semaine la rentrée scolaire qui devait avoir lieu lundi prochain. Il paraît de fait douteux que le gouvernement disperse les manifestants avant la fin du week-end.
Les «rouges» les plus déterminés disposés à «lutter jusqu'à la mort»
Pour la première fois, l’un des leaders des « chemises rouges », Nattawut Saikua, a dit aux manifestants anti-gouvernementaux qu’ils étaient libres de rentrer chez eux s’ils ne se sentaient plus en sécurité.
Une décision due aux effets du blocus du camp, organisé par l’armée, qui compromet l’approvisionnement en nourriture des ONG, organise des convois d’autocars pour aider les manifestants à rentrer en province. Beaucoup de femmes et d’enfants se sont réfugiés dans une pagode bouddhiste proche du camp de Rajprasong.
En quelques heures, le nombre des « chemises rouges » s’est considérablement réduit. Il ne reste que quelques centaines de personnes dans le camp. Beaucoup sont des militants qui se préparent à repousser un assaut éventuel des militaires.
La plupart des grands axes de la ville sont bloqués par des barrages militaires. Les affrontements se poursuivent dans plusieurs quartiers, notamment au carrefour Din Daeng dans le nord de la ville. Plusieurs milliers de manifestants ont construit des barricades à l‘aide de pneus et de sacs de sable. Ils incendient des engins de chantier et des piles de pneus.