Avec notre envoyé spécial à Taipei, Stéphane Lagarde
Une marée de drapeaux rouges et bleus devant le mémorial de Tchang Kaï-chek et le « numéro 2 », le numéro de candidat Han Kuo-yu dans cette présidentielle, qui clignote sur des panneaux numériques dans la nuit de Taipei. Des affichages « made in Taïwan » affirment avec fierté des supporters du candidat du Kuomintang, les deux lettres U et P sur les joues, « Up » de l’anglais « monter »
« Nous pensons que Han Kuo-yu est le seul à pouvoir redresser le pays. C’est le plus important pour les Taïwanais, redresser le pays et son économie. Il faut que Taïwan retrouve sa place dans le monde », explique cet auto-entrepreneur.
« On doit retrouver notre rang, reprend en écho une employée du secteur du tourisme. Contrairement à ce que certains voudraient faire croire, Taïwan n’a rien à voir avec Hong Kong, nous devons rester Taïwanais mais ne pas avoir peur de la Chine ».
« Taïwan c’est un pays dont on pouvait être vraiment fiers. On a tellement de choses à proposer, on a les meilleurs fruits et légumes par exemple mais le gouvernement actuel ne fait pas grand-chose pour nous » déplore une retraitée.
À la traîne dans les sondages
Redresser le pays, Han Kuo-yu, l’ancien grossiste en fruits et légumes a ravi la mairie de Kaoshiung dans le sud du pays en brodant sur ce thème il y a un an. Mais ses sorties sur d’hypothétiques levée du drapeau sur les sommets de plus de 3 000 mètres d’altitude ou le fait que, lui élu, tous les Taïwanais deviendrait « riches à en pleurer » ne passent plus. « Fake news » disent ses détracteurs, franc-parler rétorque Victor Tau, un professeur de géographie à l’université.
« Il est temps que les politiques parlent franchement à Taïwan. La culture asiatique nous a longtemps montré réservés. Han Kuo-yu amène une nouvelle façon de faire de la politique avec honnêteté », affirme-t-il.
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Une honnêteté contestée par certains habitants de sa ville de Kaoshiung qui, c’est une première à Taïwan, ont intenté une procédure en destitution à son encontre.
Loin derrière la présidente Tsai In-wen sa rivale du DDP dans les sondages, Han Kuo-yu fait plus que jamais figure d’outsider dans cette élection, une place qu’il ne lui pas peur selon ses supporters.
La Chine, cible préférée des indépendantistes
« Les Taiwanais à Taiwan, les Chinois en Chine ! Si tu aimes tant la Chine vas-y retournes-y ! » lance ce militant indépendantiste à la sortie de métro de Ximending quartier commerçant de Taipei. Signe de la sensibilité du sujet, l’altercation dure moins de cinq minutes avant que la police n’intervienne. C’est la fin de la pause-déjeuner. Face à la foule pressée, Hong Long-zhan, retraité, tient fièrement la banderole du parti de l’ancien président Chen Shui Bian. « Il n’y a pas de libertés en Chine. Même à Hongkong, la police se permet de frapper les personnes âgées. C’est franchement triste, les chinois sont mauvais. »
Un débat autour de la souveraineté que l’on a retrouvé dans la campagne, avec du côté de l’opposition, Han Kuo-yu qui appelle au retour au consensus avec Pékin sur le principe d’une seule Chine alors que la présidente Tsai Ing-wen, a pour slogan « résister à la chine, défendre taiwan », entrainant derrière elle près de 200 candidats indépendantistes aux législatives