De notre correspondant à New Delhi,
L’ampleur du phénomène des fausses informations en Inde est colossal. Des dizaines sont répertoriées chaque jour. Deux exemples: Priyanka Gandhi, la soeur du président du parti d’opposition du Congrès, est montrée sur une photo portant un crucifix autour du cou. Il s'agit d'un faux. La photo est éditée, mais le message est lancé: comme sa mère est italienne, Priyanka Gandhi serait une chrétienne pratiquante et agirait donc contre les hindous. Le BJP, parti nationaliste hindou du Premier ministre, retweete cette fausse information sur l’un de ses comptes Twitter officiels. Elle est partagée ensuite des centaines de fois sur Facebook et Twitter.
Le BJP est aussi pris pour cible, même si plus rarement : dans une vidéo récente, on voit un de ses dirigeants distribuer des billets à des paysans, et la légende prétend que c’est pour acheter leurs votes. Il a été prouvé ensuite que cette vidéo datait de 2012 et ce dirigeant indemnisait alors des agriculteurs. Mais le mal était fait, car la vidéo a été partagée 76 000 fois rien que sur Facebook. Ces messages sont souvent lancés sur des comptes Facebook qui n’ont pas de lien apparent avec les partis politiques. Or une enquête vient de révéler que le BJP avait créé et finançait des sociétés écrans qui gérait ces portails et créait ces fausses informations. Les liens entre les deux étant dissimulés, le BJP ne peut donc pas être accusé. Mais l’effet est immense, car les 4 principales pages Facebook téléguidées par le BJP comptent en tout près de 5 millions d’abonnés.
La lutte contre la désinformation
Il existe deux principaux sites internet dédiés à la vérification de ces informations. Alt News et Boom Live. Et ils décortiquent plusieurs rumeurs par jour en ce moment. Facebook est d’ailleurs en partenariat avec Boom Live depuis un an pour vérifier les informations de son réseau, ceci en trois langues indiennes. La firme américaine lutte également contre la propagande cachée, qui avait tellement été dénoncée lors des élections américaines: elle vient ainsi d’effacer environ 700 pages Facebook et Instagram tenues par des individus qui cachaient leur lien avec le parti du Congrès et du BJP et se servaient de ces comptes pour propager des messages politiques.
WhatsApp essaie de faire le même travail mais comme cette messagerie est cryptée, c'est plus difficile. Elle vient donc de lancer une cellule de recherches contre la désinformation: les utilisateurs peuvent envoyer des informations en 5 langues différentes et la cellule essaie et vérifier et de répondre. L’objectif final est surtout de se servir des élections indiennes, les plus grandes du monde, pour construire un outil efficace dans la lutte contre la désinformation sur WhatsApp.