De notre correspondant à New Delhi, Sébastien Farcis
Mohammed Rafi Bhat était un professeur agrégé de sociologie, âgé de 33 ans. Les cheveux courts et la barbe taillée, il enseignait à l'université publique du Cachemire, à Srinagar. Mais depuis quelques semaines, ses messages sur les réseaux sociaux montraient sa frustration : « en empêchant toute manifestation pacifique, le pouvoir en place nous oblige à nous défendre contre les forces de l'insécurité », écrit-il le 18 avril.
Vendredi dernier, ce professeur annonce qu'il rejoint le Hizbul Mudjahiddin, un groupe armé indépendantiste. Dimanche, l'armée retrouve sa trace et essaie de l'arrêter, mais il refuse de se rendre et il est tué avec quatre autres combattants.
Pour Syed Sharyar, jeune photographe de Srinagar, cette évolution est inquiétante : « Cela a surpris tout le monde de voir un professeur agrégé prendre les armes. Cela est peut-être arrivé dans les années 1990, quand il y avait la guerre et des milliers de combattants, mais pas depuis l'arrivée de la nouvelle génération. Cela montre que même les gens éduqués ont perdu espoir et sont en colère ».
Les services de sécurité sont conscients du danger : un professeur est influent et son geste pourrait inciter de nombreux étudiants à suivre cette voie du combat. En attendant, les universités sont fermées jusqu'à mercredi, à cause d'un couvre-feu imposé par l'armée.