Les premières attaques ont commencé à la mi-journée ce lundi relate notre correspondante à Hong Kong, Florence De Changy. On a vu quelques dizaines de personnes s’avancer très vite vers l’une des principaux barrages, renverser les barricades et venir tout casser sur le campement des manifestants. Éparpiller les vivres, faire tomber les tentes ; les mêmes scènes qu'il y a dix jours.
En effet, ce n’est pas la première fois que ces casseurs sont envoyés « faire le ménage » à Hong Kong. Le modus operandi est toujours le même. Ils interviennent systématiquement en bande, des groupes qui surgissent au milieu des manifestants. La plupart ont le visage couvert par des masques en papier, ceux qu’on achète en pharmacie quand on a un rhume.
Une attaque pour effrayer
Sur les vidéos diffusées sur les réseaux sociaux, ces hommes sont visiblement là pour faire peur : invectives et insultes pleuvent sur les manifestants. Certains sont même armés de bâton et n’hésitent pas à frapper ceux qui s’opposent à eux. Trois personnes ont été arrêtées pour violences et port d'armes.
Certains tweets qui arrivent de ces « fronts », si l’on peut dire, semblent indiquer qu’il y aurait peut-être à nouveau collusion de la police. Quelqu’un indique notamment que la police a préparé des camions dans lesquels elle embarque les barrières au fur et à mesure que les casseurs les font tomber. Ce qui pourrait ressembler à du travail d’équipe.
La police a déjà indiqué que dans les derniers heurts de vendredi, les triades avaient infiltré les deux côtés pour pouvoir mieux faire dégénérer la situation. En théorie, trois sites sont toujours occupés. Mais la situation est vouée à changer en fonction de la férocité et de l’efficacité des attaques de ces vandales, et en fonction aussi de la réponse que va choisir d’y apporter la police.
■ Qui sont ces casseurs ?
Pour de nombreux manifestants, il s’agit là de l’action des triades. Pour la fédération des étudiants de Hong Kong, à l’initiative des mouvements « Scholarism » et « Occupy », il n’y a aucun doute : ces hommes appartiennent précisément aux triades de Hong Kong, mais aussi de Chine continentale. D’ailleurs, certains ne parleraient même pas le cantonais.
Sur le web, des témoins laissent entendre, sans preuve, que ces gros bras pourraient être payés jusqu’à 1 000 dollars de Hong Kong - un peu plus de 100 euros - à chaque intervention musclée. Si ce lundi, rien ne prouve que les autorités chinoises sont derrière ces attaques, ce qui est sûr, c’est que jusqu’à présent la police hongkongaise est mollement intervenue lors de ces échauffourées.
Après la rétrocession de Hong Kong à la Chine en 1997, les mafias n’ont pas disparu. Certaines d’entre elles auraient même été vues d’un œil plutôt bienveillant par Pékin, selon Stéphane Laroche-Villeneuve. « Les membres des triades ne sont pas tous des gangsters. S’ils sont de bons patriotes, s’ils assurent la prospérité de Hong Kong, nous devons les respecter », a ainsi déclaré Tao Siju, le ministre chinois de la Sécurité Publique cité par le chercheur de l’université de Sherbrooke.
En février dernier, Kevin Lau, un confrère du journal Ming Pao avait été attaqué au hachoir par un homme casqué à moto. Même chose, pour Chen Ping, le président d’Isun affairs lui aussi victime d’une agression masquée. La méthode des casseurs « anonymes » est également régulièrement employée en Chine continentale pour la surveillance des dissidents placés en résidence.