Avec notre correspondant à New Delhi, Antoine Guinard
L'objectif principal de cette directive est de remédier à l'engorgement du système judiciaire indien. Sur les 380 000 prisonniers que compte l'Inde, plus de 250 000 sont en détention provisoire, en attente d'être jugés. Dans certains cas extrêmes, certains ont même passé plus de temps derrière les barreaux que le prévoit la peine maximale pour leur crime, selon un rapport paru en décembre dernier. Le gouvernement de Narendra Modi veut mettre les bouchées doubles pour remédier à cette situation. Les ministres de la Justice et de l'Intérieur ont tenu une réunion le lundi 1er septembre pour discuter des modalités de la remise en liberté de ces détenus.
A priori, il n'y a aucun obstacle juridique, puisque cette mesure est déjà inscrite dans le code de procédure pénal indien. Le gouvernement indien avait d'ailleurs par le passé envoyé une directive aux gouvernements régionaux et aux Hautes cours de différents Etats indiens à cet effet. Mais elle n'avait jamais été appliquée. Rappelons que ne sont pas concernés les détenus ayant été condamnés à mort ou à la réclusion à perpétuité.
Lenteur de la justice
Si la justice indienne est si lente à juger ces détenus, c'est parce qu' il n'y a pas assez de tribunaux et de juges pour traiter toutes les affaires. C'est surtout un problème d'infrastructure judiciaire. A titre d'exemple, 4 des 24 Hautes cours du pays sont responsables à elles seules de la moitié des affaires en attente de jugement. A long terme, le système judiciaire indien a besoin d'être réformé et, pour être plus précis, décentralisé.
En 2008, le Parlement indien avait adopté une loi ambitieuse visant à établir des tribunaux de village dans les zones rurales afin d'accélérer le processus judiciaire. Mais cette loi a été un échec. Seuls 151 tribunaux ont été mis en place alors que 5000 étaient prévus au départ. Les contraintes financières, mais aussi la réticence des avocats, de la police et des politiques y sont pour beaucoup dans cet échec. Les tribunaux continuent donc à être encombrés et, surtout, des milliers de détenus croupissent dans des prisons surpeuplées, en attendant d'être jugés.
Il est difficile de dire à quelle échéance pourra se faire la libération de ces prisonniers pour l'instant. Le ministère de l'Intérieur va demander aux autorités régionales de chaque Etat de libérer immédiatement les détenus concerné, donc en théorie cela se fera très prochainement. Le gouvernement est en train de mettre en place une nouvelle base de données pour recenser tous les détenus du pays et les détails de leur incarcération. Un système pilote a déjà commencé à la prison de Tihar de New Delhi, la plus grande du pays. Quant à l'opinion publique indienne, elle semble plutôt favorable à cette mesure, étant donné qu'elle concerne en majorité des petits délinquants.