Inde: un an après le viol collectif d'une étudiante, les mentalités et la justice bougent

Il y a tout juste un an, le 16 décembre 2012, une étudiante était violée dans un bus de New Delhi par six hommes alors qu'elle rentrait chez elle avec son petit ami. Grièvement blessée, la jeune fille décéda peu après. Cette agression avait déclenché plusieurs semaines de manifestations pour protester contre des violences toujours plus nombreuses faites aux femmes en Inde.

Avec notre correspondant à New Delhi, Sébastien Farcis

Dans la foulée des protestations, les parlementaires ont adopté des réformes importantes. Ainsi, les viols collectifs peuvent être à présent punis de la peine de mort et de nouveaux crimes ont été qualifiés comme celui de harcèlement ou d'attaque à l'acide. Un centre d'appel et d'assistance juridique a été créé à New Delhi et fait un travail formidable.

Mais ce débat a surtout permis de libérer la parole des victimes, qui osent maintenant dénoncer ces crimes : le nombre de plaintes pour viol dans la capitale a ainsi doublé en un an.

à (ré)écouter : Viols en Inde : les mentalités commencent à changer, la parole se libère

Pour que ces affaires soient traitées plus vite, le gouvernement a créé au début de l'année six cours « express » dédiées aux crimes commis contre les femmes à New Delhi, mais elles sont débordées et le manque de juges et de procureurs pour les faire fonctionner a rendu cette réforme contre-productive : ces affaires de viol ou d'attouchements sont traitées encore plus lentement qu'auparavant dans la capitale.

Le harcèlement sexuel au travail, un crime souvent oublié

Le débat porte ces dernières semaines sur le harcèlement sexuel au travail, largement négligé malgré la féminisation des entreprises. Deux affaires très médiatisées, dans des grandes institutions du pays, ont permis ce réveil. L'une implique le fondateur d'un grand journal d'investigation, et l'autre un ancien juge de la Cour suprême.

En dénonçant ces agressions supposées, les deux jeunes victimes ont brisé un nouveau tabou en Inde, car, habituellement, ces affaires étaient étouffées à cause de l'énorme pression morale et professionnelle exercée sur ces travailleuses subordonnées. Ces affaires ont alors révélé que la grande majorité des entreprises indiennes, ainsi que les institutions publiques comme la Cour Suprême, n'avaient pas de mécanisme dédié à la prévention ou à la punition de ces agressions, alors que les femmes sont de plus en plus nombreuses en leur sein.

Ce réveil se révèle salutaire, car il devrait pousser le gouvernement à publier les décrets d'application tant attendus concernant la loi sur le harcèlement sexuel au travail, adopté il y a quelques mois. Et surtout, les entreprises indiennes s'empressent à présent de créer des comités ad hoc pour répondre à tout cas de harcèlement sexuel.

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