Avec notre correspondant à Taipei, Clément Robin
C’est un village étudiant à ciel ouvert. Des jeunes débattent assis en cercle au milieu de la rue, pendant que d’autres se reposent dans leur duvet. Charyl a les traits tirés. Elle dort devant la porte du Parlement depuis le début du mouvement : « Les organisateurs nous fournissent des couvertures et des matelas pour dormir le mieux possible, ils nous amènent aussi des repas, et j’arrive à me laver tous les trois ou quatre jours ! »
Tout cela est organisé par les syndicats étudiants et soutenu financièrement par le principal parti d’opposition. Mais pour Jason, les manifestants n’ont pas d’étiquette politique. Ils sont là pour dénoncer le manque de transparence du gouvernement.
« Je suis ici pour une raison. Si le contrat avec la Chine est bon pour notre pays, pourquoi y a-t-il des points si sensibles, s’interroge Jason. ll y a beaucoup de choses que le gouvernement a voulu nous cacher. »
Et pour cause, il touche un point clé de l’économie taiwanaise, le secteur des services, qui pèse plus des deux tiers du PIB de l’île. S’il est ouvert aux entreprises chinoises, beaucoup de Taiwanais ont peur d’être économiquement envahis par le géant communiste.
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Daniel est un étudiant hongkongais. Pour lui, Taiwan n’a aucun intérêt à devenir une région autonome de la Chine, comme Hong Kong ou Macao : « Chez moi, la plupart des médias ont de nouveaux patrons, des hommes d’affaires qui les utilisent comme des outils pour attirer les intérêts chinois. Des rédactions entières ont été changées. Récemment, un journaliste a même été agressé en pleine rue ! »
Pour l’instant, les Taiwanais gardent leur liberté d’expression. Et les manifestants comptent bien le crier haut et fort, jusqu’à ce que le parti au pouvoir leur donne raison.