Australie: la Première ministre Julia Gillard évincée au profit de son prédécesseur

Julia Gillard lâchée par les siens… La Première ministre australienne a perdu ce mercredi 26 juin le vote de confiance organisé au sein de son propre parti, le parti travailliste, face à celui qui va la remplacer, Kevin Rudd. Les conséquences sont nationales : Julia Gillard devrait démissionner dès jeudi du poste de Premier ministre qu'elle occupait depuis trois ans.

Ce sont les élections de septembre prochain qui ont provoqué la chute de Julia Gillard. Depuis plusieurs mois, les sondages prévoyaient une défaite retentissante des travaillistes, censés perdre au moins la moitié de leurs sièges. Les députés travaillistes, inquiets pour leur avenir, ont donc désavoué leur chef.

Julia Gillard a pourtant un bon bilan : c’est elle qui a fait passer une taxe carbone pour pénaliser les entreprises polluantes alors que Kevin Rudd, le travailliste qui était au pouvoir avant elle et qui va prendre sa place, avait échoué. Elle avait aussi tout un projet éducatif pour les prochaines élections. Pour ce qui est de l’économie, l’Australie est un des seuls pays de l’OCDE à avoir connu ces dernières années une croissance de deux ou trois pour cent avec un chômage de l’ordre de 5%.

Les raisons d’un départ

Deux personnes voulaient plus que toute autre son départ, explique David Camroux, professeur à l’Institut de Sciences politiques à Paris et spécialiste de l’Australie. D’abord le travailliste Kevin Rudd, qui n’a jamais digéré d’être écarté du pouvoir en 2010 car, ironie du sort, il y a trois ans, Julia Gillard lui faisait subir exactement le sort qu’il lui a réservé aujourd’hui, en remportant le vote de confiance au sein du parti travailliste et en prenant sa place à la tête du pays. Depuis un an et demi Kevin Rudd tente de prendre sa revanche : il a provoqué trois votes de confiance au sein du parti travailliste en un peu plus d’un an, le troisième aura été le bon.

Autre adversaire : le chef du parti conservateur, Tony Abott, toujours très prompt à remettre en question la politique gouvernementale, et que la Première ministre a accusé l’an dernier de sexisme et de misogynie à son encontre.

Sexisme

C’est une des raisons de l’impopularité de Julia Gillard : le monde politique australien est réputé pour son sexisme. Elle était la première femme chef du gouvernement de l’histoire du pays, ce qui a occasionné des dérapages assez salés. A la mi-juin encore, dans le menu d’un dîner chic destiné à lever des fonds pour sa campagne, un candidat conservateur avait comparé la Première ministre à une caille dotée d’ « une petite poitrine » et de « cuisses énormes ».

La presse n’était pas en reste, surtout celle contrôlée par le magnat Rupert Murdoch qui la prend pour cible depuis des années. Et comme elle ne pouvait pas l’attaquer sur sa politique économique, c’est sur la question des boat people pakistanais, afghans et sri-lankais qui arrivent depuis des années dans le nord du pays que Julia Gillard a été visée – la presse regrettant une attitude jugée « trop molle ».

Pas de changement d’ici les élections

C’est donc Kevin Rudd qui remplace Julia Gillard à la tête du pays. Aucun grand changement à attendre – un travailliste en remplace une autre. Et pas non plus de modification attendue du programme de centre gauche des travaillistes d’ici le mois de septembre.

Si changement il y a, c’est surtout un changement d’image, évidemment, dans l’optique des élections : Kevin Rudd était très populaire lorsqu’il était Premier ministre. En tout cas au début de son premier mandat, les sondages le donnaient « Premier ministre le plus populaire du pays depuis trente ans ». Sa chaleur tranche avec ce côté cassant qui a été reproché à Julia Gillard ; en un mot, il est beaucoup plus médiatique.

D'ailleurs, Kevin Rudd est un ancien diplomate. Il possède ce côté international que n'avait pas la Première ministre. Il parle mandarin et, lors de son arrivée à la tête du gouvernement en 2007, il avait promis de rapprocher l'Australie de l'Asie. La Chine est le premier partenaire commercial de l'Australie.

Mais la seule présence de Kevin Rudd ne devrait pas renverser la tendance pour les élections : l’objectif des travaillistes est vraiment de limiter les dégâts.

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