Avec notre correspondant à Rangoon, Rémy Favre
Les échoppes rouvrent car les rumeurs se taisent. Ici, au marché Mingalar, bouddhistes et musulmans s’étonnent encore du climat de méfiance qui a gagné leur quartier. Une vendeuse musulmane n'en revient toujours pas : « Je me suis installée au marché Mingalar un an après sa construction. C’était il y a 14 ans. Et c’est la première fois qu’il y a de telles tensions, ici. Sous le précédent régime militaire, nous pouvions dormir sur nos deux oreilles. Sous ce nouveau régime, nous ne pouvons même pas imaginer ce qui va se produire le lendemain. »
Depuis plusieurs jours, des groupes non-identifiés se livrent généralement de nuit à des actes de vandalisme anti-musulman, détruisant sur leur passage maisons et mosquées. Dans certaines villes les dégâts sont considérables. La semaine dernière au moins 40 personnes ont été tuées dans des violences inter-communautaires dans la ville de Meiktila, dans le centre du pays. Plusieurs milliers d'autres ont été déplacées.
Ceux qui osent se confier accusent l’armée d’orchestrer ces affrontements afin de déstabiliser le gouvernement civil, aux affaires depuis tout juste deux ans : « la plupart des gens au marché disent que certains groupes sèment l’agitation dans le pays pour permettre aux militaires de revenir au pouvoir. cela semble être vrai parce que les militaires ne protègent pas très bien la population quand il y a des troubles. Ils attendent que ça se passe. »
Le Président birman, Thein Sein, a lui aussi accusé des « opportunistes politiques » et des « extrémistes religieux » d’attiser ces violences.