Birmanie: premier congrès de la LND, le parti de l'opposante Aung San Suu Kyi

La Ligue nationale pour la démocratie (LND), principal parti d'opposition en Birmanie, dirigé par la lauréate du prix Nobel de la paix Aung Sang Suu Kyi, a inauguré ce vendredi 8 mars 2013, le premier congrès de son histoire. Environ 900 délégués venus de 260 municipalités se retrouvent pendant trois jours dans la capitale birmane. L’enjeu est de structurer et de rajeunir le principal parti d’opposition birman en vue des élections législatives de 2015.

Les délégués de la LND réunis à Rangoon portent une lourde responsabilité : démocratiser et renforcer leur parti, alors que la division et l’opacité qui le caractérisent aujourd’hui commencent à l’éloigner de la population. La LND, plusieurs fois interdite et toujours harcelée par la junte militaire, n’a jamais eu la possibilité de fonctionner normalement. Nombre de ses dirigeants historiques ont été emprisonnés ou assignés à résidence, comme ce fut le cas pendant plus de quinze ans pour Aung San Suu Kyi. Octogénaires pour la plupart, ils forment aujourd’hui une arrière-garde autoritaire coupée des réalités, qui doit se mettre à jour.

Way Hnin Po, directrice adjointe de la Fondation pour l’éducation et le développement, rappelle que les attentes des jeunes sont très élevées. Ils souhaitent une vraie transformation du paysage politique. Car le pays a besoin de renforcer ses capacités institutionnelles en matière de droits de l’homme et d’organisation politique. « Pour diriger le pays et opérer une transition démocratique, il faut changer le système et il faut une personnalité forte », explique cette militante des droits civiques.

L’évolution politique de la Birmanie avance tout de même à grands pas depuis deux ans. La junte militaire s’est auto-dissoute en 2011, laissant la place à un gouvernement d’anciens militaires dirigé par le président réformateur Thein Sein. La LND, en acceptant de participer aux législatives partielles d’avril 2012 a enfin obtenu une tribune officielle pour faire entendre les revendications de l’opposition. Sur 44 sièges renouvelés, le parti d’Aung San Suu Kyi en a remporté 43. Et la dame de Rangoon, qui a passé plus de quinze ans en résidence surveillée, est désormais députée.

La société civile mobilisée

Aux côtés de la LND dans l’opposition, les mouvements hérités des révoltes de 1988 et 2007 sont très actifs. Leurs dirigeants sont jusqu’à présent restés en dehors des logiques de parti, et ont préféré agir dans la société civile. Comme l’explique Mireille Boisson d’Amnesty International France, il est difficile de savoir quel rôle ils joueront à l’avenir. Ils observent l’évolution de la LND, et certains, à l’instar de Pyone Cho, l’un des leaders du mouvement Génération 88, seront présents à la cérémonie d’ouverture du Congrès, en tant qu’invités.

Nul doute qu’ils suivront avec attention le travail de structuration du parti, indispensable pour aborder notamment les prochaines élections législatives prévues en 2015. Malgré des divisions internes et des résistances au changement, les dirigeants de la LND sont conscients des critiques, au nombre desquelles le vieillissement des cadres donc, mais aussi le manque de transparence ou encore le fait d’accepter des financements provenant des milieux d’affaires proches de la junte militaire.

Nyan Win, porte-parole de la LND, souligne que le congrès a d’abord pour objectif de renforcer le parti : « Nous essayons de transformer notre parti en un parti démocratique. Pour le congrès central nous avons élu des délégués à la base, dans toutes les régions, de toutes les composantes de la société. Nous avons besoin d’un parti plus solide que jamais. Aux élections partielles nous avons remporté 43 sièges sur 44, et pour obtenir un résultat similaire en 2015, nous préparons un parti plus fort ».

Au-delà du congrès, la grande échéance ce sont en effet les élections législatives de 2015. Il sera possible à ce moment-là de mesurer le chemin parcouru par le parti mais aussi par le gouvernement. L’opposition aura-t-elle obtenu, notamment, l’improbable réforme constitutionnelle qu’elle réclame ? Celle-ci est importante pour plusieurs raisons : d'abord parce que l'une de ses dispositions empêche Aung San Suu Kyi d'être élue présidente du fait qu'elle a été mariée à un étranger. Ensuite parce que le texte actuel réserve aux militaires 25% des sièges du Parlement.

Partager :