La Corée du Nord a-t-elle franchi un pas décisif avec ce troisième essai nucléaire ?

Ce mardi 12 février 2013, la Corée du Nord a procédé à un nouvel essai nucléaire, le troisième depuis 2006. Selon les autorités nord-coréennes et certains observateurs étrangers, cet essai pourrait marquer un pas déterminant en vue de l’obtention d’un missile avec ogive nucléaire. Les réactions ne se sont pas faites attendre. La communauté internationale a, dans son ensemble, condamné cette « nouvelle provocation ». Même la Chine, traditionnelle alliée de la Corée du Nord a fait part de sa réprobation à l’ambassadeur nord-coréen, convoqué par Pékin dans la foulée de ce troisième essai nucléaire.

Le 13 décembre dernier, la Corée du Nord mettait sur orbite un petit satellite météorologique à l’aide d’un lanceur Unha-3, un lanceur proche du Taepodong-2 et qui a toutes les caractéristiques d’un missile balistique à longue portée selon de nombreux spécialistes. Ce test, qui avait entraîné de nombreuses condamnations par la communauté internationale était en fait annonciateur d’un troisième essai nucléaire. C’est ce que de nombreux observateurs évoquaient dès décembre 2012, dont Bernard Sitt, fondateur et directeur du CESIM (centre d’études de sécurité Internationale et de maîtrise des armements).

Ce dernier, dans une chronique publiée sur le site internet du CESIM, estimait que l’un des pas que devait franchir la Corée du Nord pour bénéficier de missile à ogive nucléaire était de parvenir à miniaturiser les « engins » nucléaires. Et si l’on s’en tient aux déclarations officielles de la Corée du Nord, ce troisième essai a permis de tester « un engin miniaturisé ». Une étape dans le développement de l’arme nucléaire que redoutaient les spécialistes, comme par exemple Paul Caroll, du Ploughshares Fund, un centre de recherche sur la sécurité basé en Californie, qui a déclaré à l’AFP (Agence France Presse) : « C’est exactement la technologie dont nous espérons qu’elle leur échappe ».

Une puissance bien supérieure au premier essai

Outre la taille de l’engin, l’une des autres interrogations que soulève cet essai est sa puissance. Selon des observateurs sud-coréens, ce troisième essai nucléaire a dégagé une puissance entre six et sept kilotonnes (contre un kilotonne en 2006 et entre deux et six kilotonnes en 2009). Enfin, la troisième question que se pose la communauté scientifique et l’ensemble de la communauté internationale est relative au matériau fissile utilisé par Pyongyang.

Si jusqu’à présent, les essais de 2006 et 2009 avait été effectués avec du plutonium, ce troisième essai pourrait avoir été réalisé avec de l’uranium. Un point non-négligeable puisque la Corée du Nord dispose d’importants gisements de ce métal, contrairement au plutonium. Mais pour l’heure, il est difficile de savoir si cet essai a été réalisé avec du plutonium ou de l’uranium. Il faudrait pour cela être en mesure de détecter puis d’analyser le gaz xénon, dégagé dans l’atmosphère lors de l’explosion atomique. Mais, selon Paul Caroll : « Ce n’est pas forcément facile à trouver, et si l’essai a été mené dans un endroit parfaitement clos on ne peut pas trouver du tout ».

La condamnation de la communauté internationale est unanime

Ce troisième essai nucléaire nord-coréen a soulevé la consternation de la communauté internationale dans son ensemble. Pour la première fois, la Chine, alliée traditionnelle du régime de Pyongyang, a convoqué l’ambassadeur nord-coréen. Le ministre des Affaires étrangères chinois, Yang Jiechi, lui a fait part de sa réprobation. Il appelle la Corée du Nord à « cesser tous propos ou actes qui pourraient détériorer la situation » et « à revenir au dialogue et à la consultation dès que possible ». Même discours à Moscou qui appelle à « respecter strictement toutes les directives du Conseil de sécurité de l’ONU et à renoncer totalement au programme de missiles nucléaires ». L’Union européenne et les Etats-Unis sont sur la même ligne et appellent à un durcissement des sanctions de l’ONU.

Le Conseil de sécurité de l’ONU, convoqué en urgence ce mardi 12 février, a condamné fermement l’essai nucléaire considérant qu’il constituait une « grave violation » de ses résolutions. A l’heure actuelle, l’ONU impose un embargo total sur la fourniture, la vente et le transfert d'armes et de matériel lié à des armes à la Corée du Nord. Aucun pays n’a par ailleurs le droit de se procurer ce type de matériel auprès de la Corée du Nord. Pyongyang a interdiction d’importer ou d’exporter des produits et des technologies détaillés dans une liste de l'ONU. Outre ses sanctions, l’ONU a également gelé des fonds et des ressources d'entités nord-coréennes. Les déplacements de certains membres du régime sont interdits.

La diplomatie doit reprendre le dessus

Cette nouvelle étape dans le processus d’acquisition de l’arme nucléaire par Pyongyang va certainement accélérer la volonté de relancer les discussions sur cette question. Les deux Corées, les États-Unis, le Japon, la Russie et la Chine doivent absolument trouver un accord pour mettre un terme au développement d’un arsenal nucléaire nord-coréen, sous peine d’exacerber les tensions régionales et internationales. La condamnation de ce troisième essai nucléaire par la Chine est peut-être le signe annonciateur qu’attendaient les différents acteurs de ces discussions pour relancer les débats interrompus depuis fin 2008.

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