De notre correspondant à Séoul
Un homme soupçonné d'espionnage a été arrêté à Séoul. Les services secrets, à l’origine de l’arrestation, ont affirmé que cet espion s’appelle M. Yoo. Agé de 33 ans, c’est un ressortissant chinois qui avait réussi à se faire passer pour un réfugié nord-coréen. Il avait décroché un emploi au sein de la municipalité de Séoul, au service en charge des réfugiés. Son travail - officiel - consistait justement à rassembler des informations sur ceux-ci.
Pour l'instant, aucune information n'a été diffusée afin de savoir s’il était espion avant de venir au Sud, ou s’il a été recruté après son arrivée. Néanmoins, il est accusé d’avoir donné à Pyongyang les noms et les adresses de 10 000 transfuges. Un chiffre énorme qui concerne presque la moitié des 25 000 Nord-Coréens réfugiés au Sud.
Les informations les concernant sont censées être ultra-protégées, et ces révélations embarrassent le gouvernement de Séoul. Avant d’être autorisé à s’installer au Sud, chaque réfugié doit subir un long interrogatoire de plusieurs mois qui, justement, a pour but de filtrer les espions potentiels.
Cette arrestation est aussi un choc pour la communauté des réfugiés à Séoul, car ce M. Yoo était connu, voire apprécié pour les services qu’il leur rendait. Il était même considéré comme un modèle d’intégration réussie.
Une catastrophe pour les familles restées au Nord
Le régime considère toute fuite chez l’ennemi capitaliste sud-coréen comme un crime, un acte de trahison. La Corée du Nord applique la règle de la culpabilité par association, et peut punir très sévèrement les familles de ceux qui sont partis.
Depuis son arrivée au pouvoir il y a un an, le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un a mené une campagne active pour tarir le flux de réfugiés vers le Sud. Il a renforcé la surveillance de la frontière avec la Chine, qui est l’habituel lieu de passage. Cette politique a été très efficace, puisque le nombre de nouvelles arrivées au Sud a été divisé par deux l’année dernière.
On a aussi assisté l’année dernière à des retours très médiatisés de refugiés, qui sont repartis au Nord dans des circonstances étranges. Cet espion a peut-être joué un rôle dans ces retours mis en scène par la propagande du Nord.
Des conséquences des deux cotés de la frontière
Au Sud, beaucoup de réfugiés prennent la parole pour critiquer ouvertement le régime et les conditions de vie au Nord. Il sera plus facile pour Pyongyang de faire pression sur eux à présent, par exemple en menaçant leur famille, pour les faire taire.
Autre problème : les Sud-Coréens se méfient déjà beaucoup des réfugiés, qu’ils considèrent comme des espions potentiels. Cela donne lieu à une forte discrimination, qui rend encore plus difficile l’intégration des réfugiés au Sud. Cette arrestation va sans doute aggraver cette paranoïa dont ils sont victimes. Elle a aussi relancé le débat pour des interrogatoires plus stricts pour les nouveaux arrivants. Et sur Internet, certains remettent même en cause la politique d’accueil des réfugiés de la Corée du Sud.