En Chine, des millions de personnes menacées par les vieux barrages

Selon un rapport alarmant dévoilé hier vendredi 26 août 2011 par la presse chinoise, plus de 25 % des villes et des régions rurales sont sous la menace de barrages délabrés. Plus de 40 000 retenues d’eau ont largement dépassé la limite d’âge, estiment les auteurs de l’enquête. Et des millions de personnes sont potentiellement menacées.

C’est un scénario digne des pires films catastrophe d’Hollywood qu'a révélé ce responsable du ministère des Ressources hydrauliques au magazine China Economic Weekly.

« Ces réservoirs courent de forts risques, explique Xu Yuanming, et s’ils se brisent, ils dévasteront les surfaces agricoles, les voies de chemin de fer, les bâtiments et même les villes.» Près de 179 agglomérations et 285 villages auraient ainsi « un bassin au-dessus de la tête », selon l’expression chinoise.

Or, ces bassins ont aujourd’hui 50 ans, ils ont donc atteint la limite d’âge. La plupart d’entre eux ont été construits en pierre et en terre dans des régions montagneuses reculées à l’ouest du pays et menacent à chaque instant de rompre, affirment des officiels fatigués de devoir courir après les subventions.

Manque d’entretien

L’alerte remonte au 18 juin dernier. Près de 300 experts chinois des ressources en eau se réunissent alors à Yichang dans la province du Hubei, raconte le Nanfang Zhoumo, dans une grande enquête publiée le 7 juillet dernier. Tous les spécialistes ont alors un seul mot à la bouche : « la sécurité des barrages ». Plusieurs édifices ont donné des signes de faiblesses et sont évoqués photos à l’appui lors de la conférence, rapporte ce journal du sud connu pour son indépendance de ton.

Première diapo : les déversoirs en béton armé de la station hydroélectrique d’Ertan ont été détruits par les crues de la rivière Yalong (un affluent du Yangtzé). Même chose et là encore, image à l'appui, pour les évacuateurs d’eau du barrage de Sanbanxi dans la province de Guizhou. Un défaut de conception n’a pas permis aux installations de résister à la montée des eaux. Ces exemples traduisent le manque de subventions destinées à l’entretien des installations en place. « C’est un travail énorme, on a beaucoup de pression », confie Yuan Jun.

Selon ce fonctionnaire du Bureau des ressources hydrauliques de la province du Hubei, l’Etat fournit jusqu’à 7,3 milliards de yuans (près de 790 millions d’euros) d’aides pour l’entretien et la construction des barrages, ce qui s’avère insuffisant. Le bureau local est donc chargé de trouver 4,4 milliards de son côté. Contrairement à l’application de la politique de l’enfant unique par exemple, la gestion des barrages ne donne pas lieu à suffisamment de promotions au sein du Parti communiste chinois, semblent se plaindre aujourd’hui certains cadres sur les micro-blogs.

40 000 barrages jugés dangereux

Comme à chaque fois dans ce genre d’affaire, ces révélations ont suscité de nombreux commentaires sur les forums internet : « Quelle ironie ! note ainsi un internautequi ajoute : on a des problèmes de barrages alors que nos deux principaux dirigeants ont fait des études d’hydrologie et de géologie. » Le président Hu Jintao a effectué ses études dans le département d’hydro-électricité de l’université Tsinghua à Pékin et le Premier ministre chinois Wen Jiabao est diplômé de l’Institut de géologie de Chine.

La Chine est le pays qui compte le plus de barrages au monde (87 000). Mais la très grande majorité d'entre eux ont été construits entre 1950 et 1970. Le secteur est donc moins porteur qu’autrefois, et ne fait plus partie des politiques de développements prioritaires mises en place par le gouvernement central.

Ces révélations interviennent aussi suite à la collision entre deux trains à grande vitesse cet été, et alors que le doute dans l’opinion s’est installé concernant l’état des infrastructures dans le pays. En tout, 40 000 barrages sont aujourd’hui jugés dangereux à commencer par le plus grand d’entre eux. « En parallèle aux énormes bénéfices qu’apporte le barrage des Trois Gorges, des problèmes doivent être résolus d’urgence », reconnaissait ainsi en mai dernier le gouvernement chinois.

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