Le Pakistan lance une «opération chirurgicale» à Karachi

Les autorités pakistanaises ont décidé de tenter de mettre fin aux tueries qui ensanglantent la capitale économique du pays depuis plus de trois mois. Elles ont lancé, le mercredi 24 août 2011, une vaste opération de police pour mettre hors d'état de nuire les tueurs au service des mafias ethniques et des mouvements politiques qui font régner la terreur dans les quartiers de la ville. Environ 900 personnes ont été tuées cette année à Karachi, dont un tiers au mois de juillet.

Le ministre de l'Information de la province du Sindh déclare que c'est une « opération chirurgicale » qui a démarré pour mettre fin aux tueries. La police et les forces paramilitaires sont déployées dans Karachi. Et l’intervention de l’armée est envisagée si ces moyens s’avèrent insuffisants.

La situation est en effet devenue intenable dans la capitale économique du Pakistan. Depuis trois mois, les morts se comptent par centaines, victimes de règlements de comptes pour le contrôle des quartiers que se disputent les immigrés pashtounes des provinces frontalières, expulsés par les tensions et les opérations militaires, et les Mohajirs.

Les Mohajirs sont là depuis la création du Pakistan, en 1947. Ils comptent parmi ces millions de réfugiés de la guerre d'indépendance qui ont quitté l'Empire colonial britannique en cours de sa dislocation, et dans les pires conditions. Et ils n'acceptent évidemment pas la concurrence de ces nouveaux venus, poussés par la crise sociale et la guerre aux frontières de l’Afghanistan, qui s'installent et modifient profondément les rapports de force et le paysage social de la région.

Tension insupportable

En quelques mois la mégalopole pakistanaise est devenue infréquentable. De retour de Karachi, l’universitaire spécialiste de la région Mariam Abou Zahab témoignait voici quelques jours encore d'une tension insupportable où les gens vivent en état de siège dans leurs propres quartiers. Leurs déplacements sont balisés, limités en fonction de leur appartenance communautaire.

A Karachi, le personnel politique, les industriels et les citoyens en appellent à l’armée depuis plusieurs semaines. Jusqu’ici, en effet, le déploiement des forces paramilitaires n’a pas permis de ramener le calme. L’action des « Rangers » est même souvent critiquée pour sa brutalité qui ne fait qu’envenimer une situation qui devient inextricable.

Le problème des infrastructures est par ailleurs crucial : les coupures d’électricité dans ce poumon industriel peuvent atteindre quinze à seize heures par jour. L’accès aux ressources dépend donc directement de sa capacité à se les procurer, si besoin est les armes à la main. Et à cela s'ajoutent les millions de réfugiés de la mousson catastrophique qui a littéralement lessivé la vallée de l'Indus voici un an.

Tout était donc réuni pour obtenir un précipité explosif dont il faut aujourd'hui tenter d'éteindre l'incendie. C’est le but de l’opération qui vient de démarrer.

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