Les Européens ont prolongé pour une année supplémentaire des gels d'avoirs et les interdictions de visa d'entrée en Europe, sauf pour les membres civils du gouvernement au pouvoir - un tiers environ du gouvernement, dont le ministre des Affaires étrangères, U Wunna Maung Lwin.
Par ailleurs, les pays européens ont décidé de recommencer à effectuer des visites de haut niveau en Birmanie - rebaptisée « Myanmar » par la junte au pouvoir - tout en soulignant qu'ils veulent avoir accès aux responsables politiques du gouvernement, mais aussi aux représentants les plus importants de l'opposition.
L'équilibrisme de la diplomatie européenne
L'UE renouvelle depuis 1996 une position commune interdisant la vente d'armes et toute coopération de défense, interdisant l'entrée et gelant les avoirs sur le territoire européen des membres de la junte et de leur famille. La diplomatie européenne a également établi une liste d'entreprises birmanes liées au régime, dans lesquelles l'investissement est prohibé.
Malgré les sanctions, renforcées après la répression des manifestations de 2007, par l'adoption d'un embargo sur les importations de certaines matières premières, la coopération en matière humanitaire reste autorisée. L'UE est même le premier bailleur de fonds de la Birmanie et intervient en particulier dans les domaines de l'éducation et de la santé. Le montant de l'aide européenne à la Birmanie s'est élevé à 32 millions d'euros pour la période 2007-2010.
La figure d'Aung San Suu Kyi en question
Le débat sur la pertinence des sanctions internationales - européennes et américaines - a été relancé fin 2010, après la libération d'Aung San Suu Kyi, qui incarne l'aspiration à la démocratie en Birmanie. La « Dame » de Rangoon, Prix Nobel de la paix en 1991, a vécu la majorité de ses 20 dernières années en résidence surveillée.
Récemment, plusieurs diplomates de l'Union européenne ont débattu de l'éventuelle levée de sanctions contre la junte, avec Aung San Suu Kyi et les représentants d'autres partis de l'opposition. La célèbre opposante a réclamé le maintien des mesures internationales, imposées pour punir les violations des droits de l'homme. Les partisans des sanctions affirment qu'elles constituent la seule façon de faire pression sur le pouvoir birman.
La vitrine civile de la junte au pouvoir
Les récents changements politiques ont été accueillis avec beaucoup de scepticisme par la communauté internationale et par les opposants birmans en exil. Ils considèrent qu'en réalité l'armée a conservé le contrôle du pouvoir, même s'ils admettent l'idée que certaines réformes sont possibles.
Après les élections de novembre 2010, le numéro un du régime birman, le généralissime Than Shwe, a pris sa retraite de l'armée fin mars 2011. Il était au pouvoir depuis 1992. L'ancien général Thein Sein, Premier ministre sortant, à été nommé président, en vertu d'une nouvelle Constitution.
Un appareil d'Etat verrouillé
Le Conseil d'Etat pour la paix et le développement (SPDC), qui présidait aux destinées du pays, et était dirigé par Than Shwe, a été dissous cinq mois après les élections législatives. Than Shwe n'entend pourtant pas disparaître de la scène politique du pays ; il a annoncé qu'il reste disponible pour donner des conseils au gouvernement. L'opposition birmane en exil a évoqué la création d'un Conseil suprême de l'Etat, qui n'est pas prévu par la Constitution. Cet organe rassemblerait tous les cadres de la junte sortante.
Néanmoins, le Parlement national et les pouvoirs régionaux sont verrouillés par le Parti de la solidarité et du développement de l'Union (USDP, créé par la dictature militaire) et par les militaires d'active ; ils détiennent un quart des sièges dans chaque assemblée. Tous les postes importants, au sein des pouvoirs exécutif et législatif, à la direction de l'USDP et dans l'armée, sont occupés par des fidèles de la junte sortante. L'opposition n'a quasiment aucun rôle dans la nouvelle organisation institutionnelle.