De notre correspondant à Pékin
La Chine aura eu recours à tous les moyens de pressions dans cette crise jusqu’à l’intervention du chef de gouvernement en personne, Wen Jiabao, devant la tribune des Nations unies à New York.
Au cours de ce bras de fer qui a duré plus deux semaines, Pékin n’a jamais varié de discours : « La détention du capitaine est illégale et dénuée de sens ». Des termes à nouveau employés ce vendredi 24 septembre 2010, par la diplomatie chinoise à l’annonce de la libération.
Le ministère chinois des Affaires étrangères n’a pas chômé depuis le début de cette affaire avec l’intervention d’au moins trois de ses porte-parole, tous les jours voir plusieurs fois par jours et même la nuit. Pressions diplomatiques, pressions économiques également. On sait désormais que l’autorité du tourisme a donné rendez-vous mardi soir 21 septembre aux principales agences du pays pour les inciter à ne plus promouvoir les voyages vers l’archipel.
Le Japon risquant alors de perdre le bénéfice de l’afflux touristique suscité au début de cet été, par l’allégement des procédures de visa pour les voyageurs individuels venus de Chine. Plus de 165 000 Chinois ont visité l’archipel pendant le seul mois de juillet, un chiffre près de 2,5 fois plus élevé que l’année passée.
Fortement incitées ou non, spontanées ou pas, les réactions ne sont pas faites attendre, certaines entreprises n’hésitant pas à déclarer publiquement leur fibre patriotique. Le groupe Baojian à Pékin a ainsi annulé un voyage à Tokyo prévu pour octobre et préparé depuis plus d’un an pour 10 000 de ses employés. Le séjour n’aura pas lieu afin de « faire respecter notre dignité nationale », pouvait-on lire sur le site de la compagnie.
A l’inverse évidemment, les Japonais en vacances à Pékin n’ont pas non plus sortis leur drapeau en se promenant en ville. « Certains de mes clients m’ont même demandé s’ils risquaient de se faire attaquer place Tiananmen », confie une guide spécialisée dans l’accueil des touristes nippons. Un risque minime, il est vrai au vu du nombre de policiers présents, en uniforme comme en civil, sur la place en question.
Critiques sur internet
Pas question de griller la politesse aux dirigeants. Comme il est d’usage en Chine, les médias n’ont que peu réagi en fin de journée à l’annonce de la nouvelle. La présentatrice vedette de CCTV-1 a attendu la fin de son journal pour évoquer la libération du capitaine, en reprenant, mot pour mot, les trois petites lignes publiées dans l’après-midi sur le site du ministère des Affaires étrangères.
D’autres réactions devraient arriver ce week-end, une fois que les responsables politiques se seront exprimés. Mais en attendant les langues se délient sur internet avec de nombreux messages de satisfactions.
Un sentiment partagé évidemment par la femme du capitaine que nous avons pu joindre au téléphone à Jinjiang dans la province du Fujian. « J’ai appris la nouvelle cette après-midi. Je suis très heureuse, nous a expliqué Chen Tingting. Même si je ne sais pas encore quand mon mari sera de retour à la maison ».
Point de triomphalisme cependant. De nombreux internautes critiquent ce qu’ils considèrent comme un manque de fermeté du gouvernement. « Zhan Qixiong (le capitaine) doit exiger des indemnités », écrit un commentateur. D’autres demandent que des « mesures de rétorsions économiques soient prisent contre le Japon ». Un membre actif de la fédération pour la défense des îles Diaoyu va même plus loin et nous confirme que d’autres bateaux sont prêts à embarquer à l’avenir : « Tant que le Japon ne nous rendra pas nos îles affirme Li Nan nous continueront d’aller manifester (dans les eaux contestées) de la mer de chine méridionale ».
Reste au plus pragmatiques à faire les comptes car désormais, c’est la Chine qui à la main. Mercredi 22 septembre, quatre Japonais ont été arrêtés dans le Hebei. Les autorités chinoises les accusent d’avoir filmé des sites militaires. « Les libérer tout de suite mettrait le gouvernement chinois dans l’embarras », pouvait-on entendre sur la chaîne Phoenix TV.« En même temps, ne pas les relâcher provoquerait la colère de Tokyo ».