Cambodge : quatre Khmers rouges seront jugés pour génocide

Quatre ex-dirigeants des Khmers rouges ont été renvoyés devant le tribunal international de Phnom Penh. Ils sont poursuivis pour génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre, commis sous le régime de Pol Pot, dans les années soixante-dix.

Les quatre accusés sont l’idéologue du régime ou « Frère numéro deux », Nuon Chea, son ministre des Affaires étrangères ou « Frère numéro trois », Ieng Sary, son épouse Ieng Thirith, ministre des Affaires sociales, et le président du « Kampuchéa démocratique », Khieu Samphan.

Ils devront répondre de leurs responsabilités au sein du régime communiste totalitaire, responsable de la mort d’environ deux millions de personnes. Les procès devraient s’ouvrir au début de l’année prochaine, après trois ans d’instruction. Les accusés nient leur implication dans la famine, les travaux forcés, les tortures et les massacres qui ont décimé leur peuple au nom d’une utopie marxiste délirante. Entre 1975 et 1979, un quart de la population du Cambodge a disparu.

Ce procès n’est que le deuxième organisé par le tribunal parrainé par les Nations unies pour les Khmers rouges. En juillet dernier, il a signé un premier historique en condamnant à 30 ans de prison Kaing Guek Eav, alias « Douch », ancien chef de la prison de Tuol Sleng à Phnom Penh, dans laquelle 15 000 personnes avaient été torturées avant d’être exécutées.

D’autres responsables politiques Khmers rouges, comme Pol Pot, « Frère numéro un », leader du régime ultra-communiste, ou Ta Mok, surnommé « Le Boucher », sont morts avant d’être jugés.

Le procès de « Douch » a été le procès d’un simple exécutant, mais le procès qui s’annonce vise les quatre plus hauts responsables politiques de l’ancien régime encore en vie. L’état de santé de certains des quatre accusés est fragile, et les observateurs craignent qu’ils décèdent avant de répondre de leurs actes.

Des ex-dignitaires vieillissants et de santé fragile

Nuon Chea, 84 ans, « Frère numéro deux » des Khmers Rouges affirme n’avoir joué aucun rôle dans les atrocités. Il est considéré comme l’idéologue du parti, adjoint direct de Pol Pot et personnalité la plus secrète du « Kampuchéa démocratique ». Il serait derrière la plupart des purges qui ont ensanglanté le Parti communiste cambodgien, et passe pour l’un des architectes de la machine à tuer du régime Ieng Sary, 84 ans, « Frère numéro trois » et chef de la diplomatie, était souvent le seul point de contact entre le régime cambodgien et ses alliés - notamment la Chine.

Il est l’un des rares dirigeants communistes à avoir apporté un soutien public aux purges. A la chute de Phnom Penh en 1979, il s’est enfui en Thaïlande et a été condamné à mort par contumace par un tribunal installé par les Vietnamiens qui venaient d’envahir le pays pour chasser les Khmers rouges.

Ieng Thirith, surnommée la « première dame » des Khmers rouges, est l’épouse de Ieng Sary et belle-sœur de Pol Pot. Elle a été ministre des Affaires sociales, on lui a prêté une influence notable sur la direction du régime.

Khieu Samphan, 79 ans, ex-chef de l’Etat, nie tout rôle dans les atrocités et se présente comme un intellectuel patriote, tenu à l’écart du « noyau dirigeant » ultrasecret des Khmers rouges. Il est défendu par l’avocat français Jacques Vergès.

Démission du juge d’instruction français Marcel Lemonde

Par ailleurs, le juge d’instruction français Marcel Lemonde, l’un des magistrats instructeurs du tribunal de Phnom Penh, a démissionné jeudi. Départ planifié, car le magistrat avait rejoint les Chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens en 2006, initialement pour seulement trois ans. Dans un entretien accordé à RFI, il a précisé que le procès des quatre ex-dignitaires cambodgiens va être compliqué à gérer, car les accusés nient toute responsabilité et bénéficient du concours de quelques avocats extrêmement combatifs, qui feront tout leur possible pour empêcher que le procès aille à son terme.

Partager :