Colombie: la présidentielle «la plus sale» de l’histoire

En Colombie, la campagne pour la présidentielle du 25 mai est en passe de gagner le titre de campagne « la plus sale » de l’histoire du pays. Scandales, mensonges et vidéos éclaboussent les deux principaux candidats. Le président Juan Manuel Santos d’abord, accusé d’avoir reçu 2 millions de dollars de la mafia. C’est l’ex-président Alvaro Uribe qui le dit, sans apporter la moindre preuve. Le candidat du parti uribiste, Oscar Ivan Zuluaga est, lui, impliqué dans une affaire d’espionnage.

De notre correspondante à Bogota

Il y a encore trois semaines, Juan Manuel Santos semblait assuré de remporter les élections, la campagne était jugée très ennuyeuse. Elle est maintenant un peu trop sulfureuse au goût des électeurs. Dimanche 18 mai, la presse révélait une vidéo du candidat uribiste Zuluaga dans les locaux d’Andres Sepulveda, un hacker arrêté une semaine plus tôt pour espionnage. Zuluaga s’y entretient avec le jeune informaticien qui détient des informations confidentielles de l’armée et qui explique comment il tente de saborder les négociations de paix en cours entre le gouvernement et la guérilla. Les uribistes crient au montage et au coup bas. Mais ils ne nient pas la véracité de la vidéo. Dans un premier temps, Zuluaga avait nié connaître le hacker. Puis il a admis avoir oublié cette visite. Il a donc menti. Deuxième problème : Zuluaga peut-il faire l’objet d’une poursuite ? Les juristes en débattent. Utiliser des informations confidentielles peut en effet constituer un délit. Vous imaginez l’ambiance à quatre jours des élections.

Des proches devenus ennemis

Santos et Zuluaga étaient il y a 4 ans membres du gouvernement d’Alvaro Uribe. Ils sont devenus des ennemis, cela paraît paradoxal. M. Santos, qui avait été ministre de la Défense d’Alvaro Uribe, s’est fait élire en promettant de poursuivre la guerre contre les FARC. Une fois au pouvoir, il a trahi son mentor et décidé d’engager des négociations de paix. Elles sont le véritable enjeu de cette élection. La campagne ici n’oppose pas la droite et la gauche, mais un candidat de droite favorable à une issue négociée et un candidat de la droite dure convaincu qu’une victoire militaire est possible. Au-delà des scandales, le débat est de fond : la paix ou la guerre.

Faute de nouveau sondage, nul ne sait si le dernier scandale est de nature à modifier le résultat des élections. Les dernières enquêtes donnaient toutes pour le deuxième tour un électorat divisé en trois parts égales : un tiers pour Santos, un tiers pour Zuluaga, un tiers d’indécis. Les uribistes ne vont pas retourner leur veste puisqu’ils sont convaincus qu’il n’y a pas eu scandale mais montage. Les indécis, eux, pourraient se laisser influencer. La question est de savoir s’ils vont voter Santos ou s’abstenir parce que la politique est décidément bien sale.

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