David Petraeus devait-il démissionner de la CIA ?

Considéré comme un héros aux Etats-Unis, le patron de la CIA, David Petraeus, vient de trébucher sur une banale histoire d’adultère. Ce général 4 étoiles semblait pourtant promis à terminer une carrière exemplaire à la tête de la CIA (Agence centrale de renseignement) où il avait été nommé il y a à peine plus d’un an. On lui prêtait même l’ambition de se lancer dans une carrière politique. Sa popularité aurait pu le lui permettre jusqu’à ce funeste vendredi 9 novembre 2012.

A peine trois jours après sa réélection, le président Obama s’est dit « surpris et déçu » par la démission de David Petraeus de ses fonctions à tête de la CIA, selon un de ses proches collaborateurs. En cela, il est au diapason de ses compatriotes qui n’en reviennent toujours pas que le glorieux général David Petraeus a pu d’une manière aussi triviale tomber du piédestal qui était le sien. 

Le moment où intervient cette démission peut néanmoins intriguer. Elle arrive en effet à quelques jours à peine de l’audition prévue de David Petraeus par la commission du renseignement du Sénat et de la Chambre des représentants sur l’attaque du consulat américain de Benghazi, en Libye, le 11 septembre dernier qui a coûté la vie notamment à l’ambassadeur Chris Stevens. Cette commission d’enquête du Congrès voulait interroger Petraeus sur ce que la CIA savait de ces événements et sur son incapacité à sécuriser le poste diplomatique malgré une présence importante sur place.

Belle biographe 

Ce sera finalement le numéro deux de la CIA, Michael Morell qui témoignera et assurera l’intérim à la tête de l’agence. Mais, il semble que si la commission le souhaite, elle pourrait quand même entendre David Petraeus malgré sa démission. Voilà qui pourrait mettre à mal les théories de la conspiration qui ont le vent en poupe au sein de la droite américaine.

Surnommé « King David » par la presse américaine, le général Petraeus à 60 ans, peut se targuer d’une carrière parmi les plus prestigieuses de l’histoire de l’armée américaine. Ses épaulettes piquées de quatre étoiles témoignent de son parcours couronné par le poste de directeur de la CIA après avoir conduit la coalition internationale en Afghanistan et avoir mené l’offensive en Irak. Son action en Irak lui vaudra même d’être classé en 2007 par le Time Magazine, 33e parmi les 100 personnes les plus influentes dans le monde. Ce n’était pourtant qu’une mise en bouche avant la direction de la CIA où le nomme le président Obama en 2011. 

Cet impeccable sans-faute déraille pourtant lorsque le général Petraeus tombe amoureux de sa biographe, Paula Broadwell, une ravissante journaliste quadragénaire qui le suit comme son ombre durant une année alors qu’il est en poste en Afghanistan. Leur proximité ne passe pas inaperçue dans le petit monde militaire, mais rien d’inquiétant ne sort de ce cercle on ne peut plus discret. En tout cas pas de quoi inquiéter les services jusqu’à ce qu’une mystérieuse femme, proche du général, ne se plaigne d’être harcelée par des courriels. Le FBI décide d’enquêter et s’aperçoit que les courriels émanent de Paula Broadwell ; il découvre en même temps la liaison que celle-ci entretient avec Petraeus. Plus grave, le FBI craint que Paula Broadwell puisse avoir accès à des informations « classifiées » via l’adresse électronique de son amant.

Code d’honneur  

Bien que cette relation extraconjugale soit terminée, et malgré le fait que le FBI ait informé récemment David Petraeus qu’aucune poursuite ne serait engagée, le directeur décide néanmoins de démissionner. « Après plus de 37 ans de mariage, j'ai fait preuve d'un énorme manque de jugement en m'engageant dans une relation extraconjugale. Un tel comportement est inacceptable à la fois comme mari et comme dirigeant d'une organisation comme la nôtre », a expliqué dans son message aux employés de la CIA David Petraeus après avoir présenté sa démission à la Maison Blanche « pour raisons personnelles ». 

Les médias bruissent depuis vendredi de ce surprenant départ. Est-ce qu’une simple affaire de cœur, qui plus est terminée, justifie un tel renoncement s’interrogent des internautes ? Un ancien de la CIA actuellement conseiller à la présidence, Bruce Riedel, voit les choses autrement. Après s’être également interrogé sur la nécessité d’une démission, il est parvenu à la conclusion que pour David Petraeus, militaire depuis 37 ans, le fait d’avoir violé le code d’honneur de l’institution et ainsi de l’avoir mis en danger, ne lui laissait pas d’autre choix que celui qu’il a fait, a-t-il déclaré au New York Times.

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