Depuis des mois, Barack Obama n'est pas au mieux dans les sondages. Les fameux électeurs indépendants, ceux qui votent tantôt républicain, tantôt démocrate, se montrent très sceptiques à l'égard du président sortant. Si 52% d'entre eux ont voté pour Barack Obama en 2008, deux tiers se disent aujourd'hui insatisfaits. L'objet de leur mécontentement est la situation économique.
Pour Françoise Costes, spécialiste de politique intérieure américaine à l'université de Toulouse, Barack Obama a sous-estimé l'ampleur de la crise à son arrivée à la Maison Blanche. « Le président a cru que la somme énorme de 787 milliards, injectée dans son plan de relance, allait suffire pour redresser l’économie américaine. Aujourd’hui, la reprise est là, mais elle est très lente. Si la baisse du chômage se confirme dans les mois à venir, les électeurs indépendants pourraient être tentés de repartir vers lui. Mais si la situation économique continue à stagner, Barack Obama sera vraiment dans de très graves difficultés ».
L’économie encore une fois au cœur de la campagne Obama
En conséquence, l'économique sera, comme en 2008, au cœur de la campagne de Barack Obama. « Le président doit continuer à créer des nouveaux emplois, par exemple dans le secteur de la production », explique Joseph Smallhoover, membre du Comité national du Parti démocrate américain. « Barack Obama va concentrer ses efforts sur ce qu’on appelle le ‘Insourcing’. Il s'agit de faire revenir les emplois qui ont été délocalisés vers d'autres pays sous la présidence de George W.Bush. Nous allons également travailler sur tout ce qui concerne l’infrastructure et l’éducation, ne serait-ce que d’installer des technologies dans toutes les écoles et essayer d'améliorer ainsi la formation des futures salariés ».
Responsabilités partagées
Mais, au-delà des actions politiques à venir, le président Obama dispose d'une arme redoutable pour contrer les éventuelles critiques sur sa gestion de la crise. « Cela peut paraître paradoxal, mais le meilleur atout du candidat Obama va être le Parti républicain et plus précisément, le Congrès à majorité républicaine », estime Dick Howard, professeur de philosophie politique à la Stony Brook State University à New York. « Ce congrès a systématiquement bloqué toutes les mesures proposées par le président. Les républicains ont passé leur temps à lui mettre des bâtons dans les roues, sans faire aucune contre-proposition sérieuse. Aujourd’hui, les Américains sont dégoûtés par le Congrès. Et Barack Obama va en tirer profit et se présenter contre le Congrès».
Bataille idéologique
On ne connaît pas encore l'adversaire de Barack Obama pour la course à la Maison Blanche. Les primaires sont en cours pour désigner le candidat républicain. Mais d'ores et déjà, il y a deux visions diamétralement opposées, sur ce que devraient être les Etats-Unis qui s'affrontent avec violence.
« Nos sympathisants, nos militants, nos adhérents continuent, se mobilisent toujours d’une façon très importante afin de financer notre campagne », constate Joseph Smallhoover. « Il s’agit surtout de petits dons d'environ soixante dollars en moyenne. Ce sont des contributions que n'importe quelle famille, si elle cherche un peu, peut assumer pour soutenir la campagne démocrate. Et en face, nous avons des milliardaires qui contribuent de façon très occulte à financer la campagne des républicains ».
Si la campagne démocrate est bien évidemment elle aussi financée par certaines personnes fortunées, le président sortant se veut depuis quatre ans le défenseur des victimes de la crise.
Un affrontement qui risque de virer à la caricature politique
« Obama se place comme le défenseur des classes moyennes qui payent la crise par le chômage, par les difficultés de leurs enfants à trouver du travail ou de payer leurs études, alors que les impôts des riches continuent de baisser à cause des coupes fiscales instaurées sous l’ère Bush et qui sont encore en place », analyse Françoise Coste. Ce positionnement de Barack Obama lui vaut d’être qualifié par ses adversaires républicains de « socialiste ».
« Traditionnellement, la droite américaine se place du côté des petits contre l’élite ; pas l’élite économique mais l’élite intellectuelle qu’Obama incarne parfaitement. On assiste à une campagne présidentielle qui sera très polarisée », prédit la spécialiste. « Vous n’avez qu’à observer les primaires républicaines, où on ne parle finalement pas beaucoup de l’économie ou du chômage. La thématique prioritaire des républicains et la suivante : Obama n’est pas un vrai Américain. Ses adversaires ne cessent de répéter que le président ne correspond pas aux valeurs américaines, qu'il ne les comprend pas. Les républicains sous-entendent que Barack Obama est un étranger. La campagne jouera sur ce plan là ce qui est très malsain pour la démocratie américaine ».
Selon de nombreux observateurs, cet affrontement idéologique entre républicains et démocrates va virer à la caricature politique pendant les mois à venir, au risque d'occulter les vraies préoccupations des Américains.