Bolivie: Morales suspend le projet de route qui devait passer dans un territoire indien

La décision du président bolivien intervient suite aux manifestations des Indiens d’Amazonie contre ce projet de route à travers leur territoire. Ces manifestations ont été durement réprimées mais ont abouti à la suspension provisoire du projet. Il provoque par ailleurs beaucoup de remous politiques dans ce pays dirigé pour la première fois par un indigène.

Avec notre correspondant à La Paz, Reza Nourmamode 

Une ministre de la Défense qui démissionne, des images de la violente répression policière envers les manifestants indigènes, et une salve de critiques contre le gouvernement, y compris de la part des Nations unies. C’en est trop pour le président Morales qui décide de faire marche arrière : « Il y aura un débat national, un débat au sein du peuple bolivien, pour que ce soit lui qui décide ; et plus spécialement les deux régions concernées par le projet ». Pendant ce temps, la construction de la route est suspendue.

De leur côté, les Indiens d’Amazonie souhaitent l’annulation pure et simple du projet de construction et surtout, ils demandent, comme l’exige la Constitution, la consultation des peuples indigènes vivant sur le territoire concerné par la future route et non pas un référendum auprès d’une population plus large.

Plus tôt dans la journée, à La Paz, des manifestants indiens expliquaient se sentir trahis par leur président, comme l'un de leurs représentants le laisse entendre : « Nous nous sentons complètement trompés. Nous nous rendons compte qu’il [le président Morales] a seulement utilisé le mouvement indien pour apparaître, aux yeux de la communauté internationale, comme un défenseur des peuples indigènes. Mais dans les faits, cela est faux ».

Face à l’appui croissant reçu par les Indiens qui s’opposent au projet routier, Evo Morales a décidé de jouer l’apaisement. Reste à savoir si cela sera suffisant pour clore un conflit qui a déjà fait beaucoup de mal à l’image du premier président indigène de Bolivie.

Hier, lundi 26 septembre 2011, la ministre de la Défense, Cecilia Chacon, a démissionné du gouvernement pour marquer son désaccord avec cette violente répression qui a fait plusieurs blessés. Les manifestants dénoncent même la mort d’au moins un bébé, information démentie par le président Morales.

Un millier d’indigènes avaient entamé, il y a 41 jours, une longue marche de 600 km en direction de La Paz pour faire annuler la construction de cette route qui doit traverser leur territoire ancestral, peuplé de 50 000 Indiens.

L’intervention policière a généré de très nombreuses critiques envers l’attitude du gouvernement d’Evo Morales. Yoriko Yazukawa, la représentante des Nations unies en Bolivie, a ainsi « profondément déploré » la violence policière et a appelé le gouvernement à « respecter le droit des manifestants indigènes ».

Le président bolivien, lui-même amérindien, est notamment accusé d’avoir « trahi les siens », alors que différentes manifestations de soutien aux manifestants se sont déroulées dans plusieurs villes du pays. D’autres sont encore prévues dans les jours qui viennent.

Evo Morales a également qualifié « d’impardonnable » la violence de l’intervention policière qui a dispersé dimanche les opposants à la route et s’est dit disposé à accueillir une enquête internationale sur les agissements des forces de l’ordre.

Empêtré dans un conflit qui dure depuis plus d’un mois, le président Evo Morales joue très gros sur le plan politique.

Ce chantier de route reliant les provinces de Beni (nord) et Cochabamba (centre), devait couper une réserve écologique d'un million d'hectares, terre ancestrale de 50 000 Indiens amazoniens.

Partager :