Une drôle de campagne pour une présidentielle sans Lula

Une drôle de campagne s'est achevée au Brésil. Pour la première fois depuis 1989, l'ancien syndicaliste Luiz Inacio Lula da Silva n'était pas candidat. Officiellement, car on ne parle que de lui, on ne voit que lui ! Plus que les candidats, plus que sa dauphine Dilma Rousseff et son principal opposant, José Serra. La popularité de Lula est au sommet : 80% de « satisfaits » après huit ans de pouvoir.

De notre correspondante au Brésil,

Peut-être à cause de son passé d'ouvrier, Lula a inventé « le président qui pointe ». Le soir après 18 heures et les week-ends, il n'est plus président. Et comme avant, il endosse ses chemises, rouge comme la banderole du Parti des travailleurs (PT), et il bat la campagne. Un jour à Sao Paulo, le lendemain à Salvador de Bahia, le jour suivant à Rio de Janeiro. Souvent aux côtés de son ancienne chef de cabinet, mais pas toujours.

Le chef de l'Etat tout sourire est aussi sur les affiches de tous les candidats de la coalition. Les prétendants s'arrachent ce cliché qui vaut des voix, se disputent aussi ses interventions dans les pubs radio et télé. Pour Dilma, Lula a déclaré dans son dernier message aux électeurs : « Voter pour Dilma, c'est voter pour moi et un gouvernement meilleur encore. » La transfusion de popularité fonctionne à merveille.

« La femme choisie par Lula » comme disent les électeurs du président, est toujours en tête des sondages, capable de l'emporter dimanche. Mais des polémiques de fin de parcours ont surgi, pour ternir la fulgurante ascencion de Dilma Rousseff. Autour du thème de l'avortement, ou d'attaques circulant sur Internet. Le suspense est relancé.

Même José Serra a du mal à se détacher de l'envahissant président. En début de campagne, le Parti social démocrate (PSDB) avait diffusé des photos de Serra et Lula ensemble. L'ancien gouverneur de Sao Paulo a passé du temps à expliquer qu'il voulait se différencier de Dilma, « sans passé politique », alors que lui a, notamment, lutté avec Lula contre la dictature. Dans ses propositions, José Serra n'a pas osé être trop critique : si son parti a longtemps dénoncé la Bourse famille comme « un programme assistencialiste », lui promet un 13e mois aux 12 millions de foyers qui reçoivent la populaire Bourse. L'ancien ministre de la Santé, qui avait perdu face à Lula en 2002, pourrait perdre dès le 3 octobre face à Dilma Rousseff.

Marina Silva essaie de jouer les arbitres de cet affrontement, la candidate du Parti vert grignote des pourcentages. « Une vague verte », assure l'ancienne ministre de l'Environnement de Lula. Malheureusement, cette sénatrice de l'Amazonie a délaissé ses propositions environnementales, pour insister sur l´amélioration de l´éducation, et séduire les évangélistes, groupe religieux auquel elle appartient. Elle est la seule à avoir présenté son programme de gouvernement.

Mais le scrutin de dimanche n'est pas seulement présidentiel, il est aussi parlementaire et local. Plus de 22 000 candidats, soit 36 prétendants par poste. Et des personnages folkloriques ont créé la surprise.

Le champion de ces curiosités est sans nul doute Tiririca, un clown très populaire devenu la coqueluche de l'électorat paulista : à Sao Paulo, la capitale économique du Brésil, le représentant du Parti de la Répubique (PR) de la coalition au pouvoir, pourrait devenir le parlementaire le mieux élu du Congrès. Son slogan : « Ça ne peut pas être pire ». Après avoir déclaré ne pas savoir à quoi sert un député, il propose de défendre des allègements fiscaux pour les cirques. Autres curiosités : une actrice porno, Cameron Brasil, qui invite à voter pour elle « avec beaucoup de plaisir... ».

A Rio, un ancien champion du monde de la Coupe de 1994 fait recette : Romario, en passe d'être élu député. Vêtu du maillot 11 de la Seleção, l'enfant des favelas visite les plus humbles, en promettant des installations sportives dans les bidonvilles. A 44 ans, l'attaquant aux mille buts veut encore marquer « un but pour le Brésil ».

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