Venezuela : le retour de l’opposition dans le jeu parlementaire

Les Vénézuéliens se rendent aux urnes ce dimanche 26 septembre 2010 pour renouveller le Parlement. Totalement absente de la vie parlementaire depuis 2005, l’opposition part à la conquête des déçus d’Hugo Chavez. Elle a ainsi axé sa campagne sur les questions d’insécurité. Le scrutin législatif risque donc de prendre la forme d’un plébiscite sous la forme d'une question simple : pour ou contre le chef de l’Etat.

« L’Histoire d’amour entre Chavez et le peuple est terminée. Nous sommes de retour », veut croire Berta Morales, une des principales figures de l’opposition au Venezuela. Dix-huit millions d’électeurs sont appelés aux urnes dimanche 26 septembre 2010 pour renouveler leur Assemblée nationale. Ils doivent élire 165 députés.

Aujourd’hui, la chambre est presque exclusivement chaviste puisque les partis traditionnels avaient boycotté les élections législatives de 2005. Cette erreur, de l’aveu même de l’opposition, a permis à Hugo Chavez de mettre en place ses projets de nationalisation, de nommer les personnes de son choix à des postes clés et de confirmer la dérive autoritaire de son régime.

L’insécurité au centre des préoccupations

Au pouvoir depuis onze ans, le président vénézuélien travaille à sa révolution bolivarienne. Son accession au Palais de Miraflores, en 1999, avait suscité un immense espoir. Aujourd’hui, il est parfois contesté. L’opposition part donc à la conquête des déçus du chef de l’Etat dont la côte de popularité oscille entre 46 et 50%.

Elle a basé sa campagne sur l’insécurité croissante, une inflation record (25%) ou encore la crise énergétique qui entraîne de fréquentes coupures de courant, dans un pays qui est aussi le premier exportateur de pétrole.

C’est surtout la hausse de la criminalité qui mine le Venezuela. Selon l’Observatoire de la Violence à Caracas (ONG), « le nombre de meurtres a doublé au cours de la dernière décennie et dans 90% des cas les crimes ne sont pas résolus ». Les autorités abordent rarement cette problématique, elles ne publient plus de chiffres officiels sur la criminalité depuis des années.

Or, ces derniers jours, la presse a tout de même fait état de « 19 000 homicides commis en 2009 dans le pays ». Des statistiques qui font dire au New York Times que « le Venezuela est aujourd’hui un pays plus dangereux et plus violent que l’Irak  ».

Hugo Chavez veut une victoire « par KO »

Pourtant, les nombreux partis d’opposition réunis sous la bannière de la Coordination de l’Unité Démocratique ne semblent pas en mesure de mettre Hugo Chavez en minorité au Parlement. Le chef de l’Etat reste populaire et il a été omniprésent pendant la campagne.

Hugo Chavez a bien l’intention de remporter les élections « par KO » et de conserver une majorité qualifiée à l’Assemblée, ce qui lui permettrait de « radicaliser la révolution bolivarienne », et de continuer la nationalisation de plusieurs secteurs clés de l’économie.

« On va donner une raclée à ces corrompus, ces sans gêne, ces subordonnés de l’empire yankee », assure le président, en parlant de ses adversaires politiques. Il a donc fait une campagne active pour le Parti Socialiste Uni du Venezuela (PSUV). « Mes candidats sont ceux du peuple et de la révolution. Voter pour eux, c’est voter pour Chavez », répète-t-il inlassablement.

En effet, la bataille va bien au-delà du scrutin de dimanche. Ces législatives devraient avoir valeur de test et pourraient bien devenir un plébiscite : pour ou contre le chavisme. Or, l’objectif est fixé : les élections présidentielles de 2012 où l’actuel chef de l’Etat compte bien briguer un nouveau mandat. « Ça sent 2012 », a lancé Hugo Chavez pendant la campagne, « je fais chauffer le moteur », dit-il.

Un nouveau découpage électoral

En 2009, un référendum constitutionnel avait permis la réélection, illimitée pour tous les mandats y compris présidentiel. Aujourd’hui, l’opposition assure que le débat politique se limite à une question : « savoir si on aime Chavez ou pas ». L’enjeu pour le chef de la gauche radicale latino américaine est de contrôler les deux tiers de l’Assemblée nationale.

L’Etat a procédé l’an dernier à un redécoupage de la carte électorale qui donne plus de poids aux circonscriptions rurales. C’est là que le « chavisme » a de nombreux partisans.

Conclusion : même en obtenant un grand nombre de suffrage au niveau national, l’opposition ne sera pas mécaniquement majoritaire en sièges. Selon certaines estimations, l’ensemble des forces anti-Chavez, toutes tendances confondues, pourrait décrocher 60 sièges sur les 165 à pourvoir. Si Hugo Chavez conserve une majorité qualifiée, l’Assemblée nationale restera une simple chambre d’enregistrement.

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