Avec notre envoyée spéciale à Bogota, Véronique Gaymard
Cette première condamnation était très attendue. Les deux chefs paramilitaires sont accusés d'avoir commis un massacre en mars 2000 dans lequel 13 paysans ont été tués et des centaines ont dû fuir. Le 10 mars 2000, deux groupes de paramilitaires se retrouvent près de la localité de Mampujan à la recherche de guérilleros. A leur tête : Edward Cobos Téllez alias « Diego Vecino » et Uber Banquez Martinez alias « Juancho Dique ». Ils regroupent les deux cents familles du village sur le terrain de football. Un homme encagoulé désigne ceux qu'ils veulent exécuter.
Entre-temps, leurs hommes pillent le magasin et plusieurs maisons, et selon des témoins violent des femmes. Après 24 heures, ils menacent les habitants de les tuer comme des chiens s'ils ne quittent pas immédiatement le village. Trois cents familles s'enfuient. Mais les paramilitaires en ont retenu une dizaine comme otages, pour circuler autour de la zone. Comme ils n'ont trouvé aucun guérillero, ils exécutent les otages en leur tranchant la gorge.
L'audience du procès a permis aux familles de victimes de faire face à leurs bourreaux, de connaître la vérité. Les deux coupables devront payer une réparation à chaque famille de victime décédée et déplacée. C'est en échange de ces informations que la loi Justice et paix ne les condamne qu'à huit ans de prison. Avant d'avoir été intégrés dans ce processus de collaboration, ils avaient été condamnés à 39 et 38 ans de prison pour les délits de déplacement forcé, homicide, prise d'otage, association de malfaiteurs et port d'arme et utilisation illégale d'uniformes des forces armées.
Pour beaucoup d'associations de victimes, la condamnation à 8 ans de prison pour des faits considérés comme des crimes contre l'humanité équivaut à une amnistie. Un rapport officiel publié lundi 28 juin 2010 indique que plus de 53 000 combattants de ces groupes illégaux ont accepté de se désarmer dans le cadre de la loi Justice et paix, mais selon plusieurs organisations, ils seraient plusieurs milliers à avoir repris les armes.