« Nous avons tous souffert de l'ancien régime », a déclaré Omar el-Béchir en arrivant à Tripoli. « Nous sommes les deuxièmes à avoir le plus souffert après le peuple libyen ». Le numéro un soudanais a sans doute besoin de justifier auprès des nouvelles autorités cette visite, lui qui en 2009 ne tarissait pas d'éloges sur le Guide libyen qui l'avait soutenu contre la Cour pénale internationale et accueilli en grandes pompes à Syrte.
Mais les Etats n'ont pas d'amis, ils n'ont que des intérêts, c'est connu, et Omar el-Béchir n'ignorait pas que Mouhammar Kadhafi soutenait militairement les rebelles darfouris du MJE. Ces deux dernières années, les relations soudano-libyennes étaient d'ailleurs devenues tendues. Et lorsque le peuple libyen s'est soulevé, Omar el-Béchir n'a pas hésité à rendre à Kadhafi la monnaie de sa pièce. Il affirme aujourd'hui avoir livré des armes à ceux qui étaient encore les rebelles du CNT.
Cette visite, si elle vise à établir de bonnes relations entre les deux pays qui partagent une frontière commune, permet aussi à Omar el-Béchir de défier une fois de plus la communauté internationale.
Les Occidentaux ne sont sans doute pas ravis de voir le nouveau régime libyen accueillir un homme recherché par la Cour pénale internationale, la CPI. Ainsi, un responsable de Human Rights Watch estime qu'en accueillant Omar el-Béchir, le CNT envoie un message troublant quant à son engagement en matière des droits de l'homme et d'Etat de droit. Pour Human Rights Watch, le respect des droits de l'homme et la mémoire des centaines de milliers de victimes au Darfour sont prioritaires.