Julius Malema comparaissait en comité de discipline pour avoir notamment interrompu une réunion des dirigeants de l’ANC en août dernier et pour avoir appelé au renversement du gouvernement du Botswana voisin. Les instances disciplinaires du parti l’ont ainsi reconnu coupable d’avoir provoqué de sérieuses divisions au sein de l’ANC et d’avoir terni la réputation du parti au pouvoir. En revanche, il n’a pas été reconnu coupable d’une accusation de « propager racisme et intolérance politique » malgré ses discours anti-Blancs à répétition.
Comparaissaient également lors de ce « procès », cinq des principaux lieutenants de Malema. Parmi eux, le porte-parole de la Ligue de la jeunesse, Floyd Shavangu. Il a été suspendu pendant trois ans, reconnu coupable d’avoir insulté un journaliste et d’avoir accusé l’ANC d’association avec les impérialistes. Les trois autres responsables ont été suspendus, mais avec sursis.
La bataille n’est pas finie
Julius Malema a annoncé, devant des partisans réunis sur le campus de l’université de Pokokwane, à 320 km au nord de Johannesburg, qu’il ferait appel de cette sanction. Il a deux semaines pour le faire.
Fiona Forde, journaliste, est l’auteur d’un récent portrait sans concessions de celui qui est président de la ligue depuis 2008 et devenu l’un des hommes politiques les plus controversés d’Afrique du Sud. Elle considère que « cette procédure d’appel va prendre du temps ».
En tout état de cause, les sanctions sont, cette fois-ci, plus sévères. A force de provocations, d’écarts de conduite et de discours contraires à la ligne du parti, Malema, 30 ans, donnait souvent l’impression que personne, et surtout pas le président Jacob Zuma, n’avait d’influence sur lui.
Zuma espère se débarrasser du turbulent Malema
La procédure de discipline a été largement perçue comme une bataille d’influences au sein même de l’ANC, avant le congrès prévu pour décembre 2012 qui marquera le centième anniversaire du parti. La direction de la Ligue de jeunesse contestait en effet de plus en plus clairement l’autorité du président Jacob Zuma et demandait ouvertement son départ en l’accusant d’être mou et de ne pas s’engager suffisamment pour la transformation socio-économique du pays, dix-sept ans après l’arrivée de l’ANC au pouvoir.
Julius Malema était plus utile à l’autre faction qui lutte pour le pouvoir au sein même de l’ANC. Il a notamment reçu l’appui de Winnie Mandela, l’ex femme de Nelson Mandela qui a témoigné en sa faveur devant le conseil de discipline. Toujours parlementaire et membre de l’ANC, Winnie Mandela est toujours très influente en Afrique du Sud et très populaire dans les townships.
Parmi ceux qui sont considérés comme des adversaires potentiels du président Zuma dans les luttes de pouvoir qui secouent l’ANC, figurent aussi l’actuel vice-président Kgalema Motlanthe et le ministre du Logement Tokyo Sexwale, qui avait un temps été en lice pour briguer la présidence en 1997 (après Nelson Mandela).
En décidant de frapper fort, l’ANC a non seulement décapité la Ligue de la jeunesse mais elle espère également qu’ainsi elle empêchera Julius Malema d’avoir son mot à dire. Cinq ans de suspension, c’est une éternité en politique, et c’est l’année prochaine, donc, que l’ANC devra renouveler sa direction et choisir son prochain candidat pour l’élection présidentielle.