Selon l’hebdomadaire La Gazette, le renvoi de Bara Tall devant la justice, demandé dans un réquisitoire du 1er juillet 2010, n’était en fait pas la première option retenue par le parquet sénégalais. Le journal publie dans sa dernière livraison le fac-similé d’une autre réquisition, datée elle du 26 avril, deux mois plus tôt, et qui proposait au juge d’instruction le non-lieu.
Pourquoi ce changement ? Que s’est-il passé entre-temps dans les tuyaux de la machine judiciaire sénégalaise ? Le procureur de la République du tribunal de Dakar, Ousmane Diagne ne nie pas qu’il y ait eu des demandes ou des pressions du pouvoir politique, mais il assure que la décision finale a été prise par le parquet en toute indépendance.
« Je ne pense pas que la question soit de savoir s’il y a eu des pressions ou pas. Parce que ces pressions sont, à la limite, naturelles. La question c’est justement notre aptitude à résister à ces pressions. Dans cette affaire, il s’agissait d’apprécier la qualité des charges qui étaient à notre disposition et qui pouvaient justifier éventuellement le renvoi de l’affaire. C’est ce que nous avons fait en toute objectivité et en toute indépendance et que nous assumons. »
Pour Maître Ali Fall, l’un des avocats de Bara Tall, si en deux mois le parquet a pu changer aussi radicalement d’avis, c’est qu’il a reçu, dit-il, des instructions du pouvoir politique.
« Le décalage entre le projet, comme le dit le parquet, et le réquisitoire aux fins de renvoi deux mois après, montre qu’il s’agit d’une affaire strictement politique. Quand on prend le contre-pied total du projet, ce n’est plus du tout d’un projet qu’il s’agissait. C’est que l’on a totalement révisé sa position, parce que des instructions totalement contraires à la première position ont été données, c’est une évidence. »
Lors des audiences, en avril, cinq ans de prison ferme ont été requis contre Bara Tall. Le jugement doit être rendu le 17 mai prochain.