La sortie de scène de Laurent Gbagbo

Le président sortant de Côte d’Ivoire a été arrêté ce lundi 11 avril 2011, après une offensive généralisée contre la résidence où il était retranché depuis quelques jours. Laurent Gbagbo quitte donc le pouvoir par la force, onze ans après son arrivée à la présidence.

Il aura résisté jusqu'au bout.

Entouré de son épouse, Simone, la compagne de tous les combats, et de ses enfants, dont son fils ainé, Laurent Gbagbo a été arrêté dans sa résidence, transformée en bunker.

Ironie de l'histoire, il a été conduit par un commando FRCI à l'Hôtel du Golf, cet hôtel où son ennemi Alassane Ouattara est resté reclus pendant plus de quatre mois et que Laurent Gbagbo avait fait bombarder la semaine dernière.

Le professeur d'histoire, le syndicaliste, le premier à s'opposer au tout puissant Félix Houphouët-Boigny, le fondateur du Front populaire ivoirien (FPI), le tribun qui savait parler à ses partisans, le président d'une Côte d'Ivoire déchirée, a perdu sa dernière bataille, onze ans après avoir réalisé son rêve : devenir président.

Il accède à la magistrature suprême en 2000, dans des conditions qu'il qualifie lui même de « calamiteuses » : un scrutin dont sont exclus Alassane Ouattara et l'ancien président Henri Konan Bédié. Il hérite d'un pays en crise, miné par le virus de l'ivoirité.

Un bref état de grâce

 

Deux ans après son accession au pouvoir, une rébellion éclate dans le nord du pays, ce nord dont les habitants ont été les premières victimes de l'ivoirité. La propagande officielle les qualifiait à l'époque d'Ivoiriens « de circonstances ».

A la tête d'un pays coupé en deux, grâce à l'intervention française qui a arrêté les rebelles au sud de Bouaké, Laurent Gbagbo résiste, tente de reconquérir le nord du pays en novembre 2004. Il échoue. Il se résout cette année là à partager le pouvoir avec le chef des forces nouvelles, Guillaume Soro qu'il nomme Premier ministre.

Pendant trois ans, jusqu'en 2010, Laurent Gbagbo s'emploiera à manœuvrer pour retarder l'élection présidentielle, avant d'accepter de se mesurer à ses deux principaux rivaux : Alassane Ouattara et Henri Konan Bédié.

Malgré sa défaite électorale, Laurent Gbagbo ne s'avoue pas vaincu. Il résiste. Le fin tacticien gagne du temps. Il joue sur les divisions de l'Afrique, grâce au soutien de ses alliés sud-africain et angolais. Favorable à des négociations avec son rival, il prépare dans le même temps, en coulisses, l'option militaire, qui aurait pu lui permettre de rester dans son fauteuil présidentiel.

 

La détermination de la communauté internationale et l'implication de la France en décideront autrement.

A tous les émissaires qui lui demandaient de sortir la tête haute, Laurent Gbagbo quitte la scène, les yeux hagards, transpirant à grosses gouttes, en tricot de corps dans une chambre d'hôtel sous bonne garde.

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