Charles Taylor boycotte le réquisitoire lors de son procès

C’est la dernière étape avant le jugement dans le procès de Charles Taylor qui a commencé il y a 3 ans et demi à La Haye, devant la Cour spéciale pour la Sierra Leone. L’ancien président du Liberia est poursuivi pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité : il est accusé d’avoir créé, soutenu, financé les rebelles sierra-léonais du RUF coupables des pires atrocités pendant la guerre civile dans ce pays, dans les années 90. Ce mardi, c’est le réquisitoire. Le Procureur tentait de convaincre les juges de la culpabilité de Charles Taylor. Mais la journée a commencé sur un coup de théâtre du côté de la défense.

Avec notre envoyée spéciale à La Haye, Sarah Tisseyre

L’avocat de Charles Taylor, qui devait plaider demain, prend d’emblée la parole ce mardi matin. Il reproche aux juges d’avoir rejeté la version écrite de sa plaidoirie, sous prétexte qu’il l’a envoyée avec 20 jours de retard. Nous reprocher 20 jours de retard, pour un procès de 3 ans, ça n’est pas raisonnable, lance le charismatique Courtenay Griffiths !

Un bras de fer s’engage avec les juges, le ton monte. « Dans l’intérêt de la justice, nous quittons l’audience », annonce l’avocat. Il fait signe à Taylor, derrière lui, en costume anthracite et cravate gris perle : « On s’en va ».

Le Procureur intervient : « vous ne pouvez pas partir comme ça, c’est la Cour qui décide si elle vous y autorise ou non ! »

Courtenay Griffiths se lève et quitte la salle pourtant, même si les juges lui ordonnent de se rassoir et le menacent de poursuites pour outrage à la Cour. L’avocat, qui a quitté la salle, annonce qu’il va faire appel, pour que les 800 pages de son dossier soient prises en compte avant sa plaidoirie.

Un homme décrit comme intelligent, charismatique et manipulateur

Le réquisitoire a commencé d’abord en présence de Charles Taylor, qui avait fait mine de se lever lui aussi, mais en a été empêché par ses gardes.
L’ex-président libérien est resté seul pendant deux heures, les mains sous le menton, les yeux souvent fermés, pour entendre le réquisitoire du Procureur.

Mais ensuite, il a profité de la pause pour faire savoir qu’il se sentait mal et devait rentrer se reposer en prison.

Le Procureur, Brenda Hollis, le décrit comme un homme intelligent, charismatique et manipulateur. En détails, elle l’accuse d’être le plus haut responsable de la campagne de terreur qui a ravagé la Sierra Leone dans les années 90.

De son ton ferme d’ancienne militaire de l’US Air Force, Brenda Hollis rappelle ce qu’ont été les atrocités du RUF dans ce pays, les meurtres, les amputations, les viols de masse, les enfants soldats, l’esclavage sexuel, les gens brûlés vifs dans leurs maisons.

Charles Taylor est individuellement responsable de ces crimes, selon Brenda Hollis. Il était le chef du RUF, les leaders rebelles l’appelaient le patron. Il leur a fourni des armes et munitions. Il leur donnait des ordres, il a ainsi planifié l’attaque sur la zone diamantifère de Kono. Il avait connaissance des crimes commis et n’a rien fait pour les empêcher ou punir les auteurs.

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