Le Festival des Récréâtrales à Ouagadougou, un espace de débat social

Pendant une semaine, Ouagadougou vit au rythme du théâtre. La 6e édition du Festival « Les Récréâtrales » accueille jusqu’au 12 novembre des compagnies des quatre coins du continent africain et des Caraïbes. Quatorze pièces sont programmées dans le In sans compter celles du Off. Une édition marquée par une implantation très forte dans un quartier populaire d’Ouaga où le théâtre s'est donné dans la rue, dans les salles mais aussi dans les cours des maisons. RFI a rencontré sur place le directeur du Festival, Etienne Minoungou.

RFI : Quelles sont les principales forces de cette année ?

Etienne Minoungou : La particularité de cette sixième édition, est que nous avons inscrit Les Récréâtrales dans un quartier populaire d’Ouagadougou. J’ai toujours pensé que le théâtre était un espace de débat social. Mais comment peut-il devenir et rester un espace de débat social, si vous le centralisez trop, jusqu’à en exclure finalement, différentes composantes importantes de la société ? 

RFI : L’idée était de vous implanter dans un quartier populaire. Comment s’appelle ce quartier où nous sommes ?

E.M. : Nous sommes dans le quartier Gounghin-nord. Mais dans la réalité, ce quartier s’appelle Bomsonting, ça veut dire « le lieu où il fait bon vivre ». Nous sommes inscrits dans ce quartier depuis maintenant quatre ans, mais c’est véritablement cette année que nous sommes très présents, à travers le fait que nous avons investi toute une rue, que nous avons fait une implantation scénographique en lumière, en matière, en étoffe, et que surtout les cours adjacentes à cette rue, qui appartiennent à des familles ; les Compaoré, les Bazié, les Ladanbega, les Bationo, les Sib… Eh bien nous leur avons demandé s’il était possible que finalement nous puissions installer des univers théâtraux à l’intérieur de leurs cours. Ce qu’ils ont accepté. Et ça donne aujourd’hui des théâtres assez atypiques.

RFI : Votre ambition, c’est de faire du Festival des Récréâtrales le marché du spectacle vivant. Ce marché a existé à Abidjan et il s’appelait le MASA. Il n’existe plus et vous souhaitez qu’il soit repris à Ouagadougou ?

E.M. : Oui. Le marché des arts du spectacle d’Abidjan avait cette force et cette particularité, de créer véritablement un espace de diffusion, un espace de marché pour les professionnels et l’entrée des artistes. Mais depuis, avec la situation de la Côte d’Ivoire, la guerre et le processus de normalisation qui a tardé à se mettre en œuvre, eh bien, le MASA est mort. Il fallait évidemment, qu’ailleurs sur le continent, d’autres espaces puissent naître. C’était un besoin vital d’avoir un marché. On ne peut pas créer et ne pas savoir tourner. On ne peut pas créer et ne pas savoir en vivre. Donc pour nous, l’ambition, c’est de faire d’Ouagadougou la destination marché pour le théâtre, à travers le projet des Récréâtrales.

RFI : Qu’est-ce que vous accueillez cette année, en matière de diffuseur, de producteur, d’administrateur de théâtre ?

E.M. : Nous avons ici une quarantaine de programmateurs, directeurs de festivals et tourneurs, qui sont là. Il y a d’abord les directeurs de festivals d’Afrique, le festival de théâtre du Bénin, le festival de théâtre de la fraternité de Lomé et nous avons le directeur du festival Femmes en Scène en Côte d’Ivoire, Mantsina sur Scène à Brazzaville, nous avons le Festival des réalités, nous allons avoir aussi Macodou Mbengue du Sénégal…

RFI : Et puis il y a aussi beaucoup qui viennent d’Europe.

E.M. : Je suis heureux de constater que cette année, Vincent Baudriller, le directeur du festival d’Avignon, est là. La directrice du festival des Francophonies en Limousin est là, il y a des Allemands, des Suisses, des Français, des Belges. Cela veut dire, que le travail que nous avons pu faire depuis quelques années, commence à être connu, à être reconnu. Les artistes peuvent avoir la chance de se mettre dans le marché international, avec des propositions fortes et originales, qui intéressent aussi les publics.

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