Slogans sexistes et produits vaisselle font-ils bon ménage?

« Il faut pomper pour que ça gicle », « C'est connu, le plaisir vient en astiquant » et « Ne pas avaler ? Zut, pour une fois que j'étais d'accord », ces slogans étiquetés sur des produits vaisselle dans les rayons du BHV Marais, à Paris, ont fait réagir massivement les internautes. Ces slogans sont-ils drôles ou relèvent-ils du sexisme ? La polémique est partie du tweet d’une jeune femme « choquée par l'ampleur qu'ont pris les choses ». Caroline de Haas, féministe et activiste, fondatrice du site Macholand.fr, livre son analyse sur ce débat qui reflète, selon elle, « la nostalgie d’une époque où l’on mettait la femme dans une case ». Entretien.

RFI : Que répondez-vous à ceux qui ne voient dans ces slogans jugés « sexistes » qu’une plaisanterie à prendre au second degré ?

Caroline de Haas : Que ce soit du second degré, du cinquantième degré ou du premier, c’est pareil ! C’est faire perdurer les inégalités au lieu de les neutraliser. Mon but n’est pas de débattre sur l’humour mais de combattre cette espèce de nostalgie d’une époque où l’on mettait la femme dans une case, celle qui astique une bouteille de boisson gazeuse ou ses fourneaux. Je ne sais pas si on ferait les mêmes blagues sur les handicapés, par exemple. Le BHV n’aurait d’ailleurs probablement pas commercialisé un produit au marketing relevant du second degré et qui tourne en dérision la situation des handicapés.

Sur son profil Twitter, Ecusette de Noireuil, la jeune femme auteure du tweet à l'origine du « scandale », avoue avoir été « choquée » et revendique simplement son droit à ne pas trouver cela drôle. Elle estime que « ces micro-agressions de mauvais goût en disent beaucoup sur notre société ». Qu’en pensez-vous ?

Vous imaginez qu’en 2015 on puisse faire face à des propos du type : « C’était mieux, avant, la société. Quand on pouvait tenir des propos racistes, homophobes ou sexistes. C’est vraiment dommage maintenant. » L'intolérance au sexisme bouge et je ne trouve pas cela dommage du tout. Au contraire, même si elle est encore faible, c’est un progrès. Il y a cinq ou dix ans, ce genre de publicité serait passé inaperçue. Qu’une entreprise comme cette marque de liquide vaisselle fasse son business avec le sexisme dénote un véritable problème d’intelligence. Et puis réduire la sexualité de la femme au fait d’astiquer le pénis des hommes, franchement..!
Comment est-ce possible aujourd'hui de ne pas être au courant des dégâts que crée le sexisme dans la société ? Comment ces chefs d’entreprise peuvent-ils se lever le matin en se disant que « les violences faites aux femmes, c’est horrible », et après aller vendre leurs produits qui dévalorisent ces mêmes femmes, alors qu’on sait que les violences commencent souvent par un mot ? Un petit mot juste comme il faut, pour humilier la femme.

Qu'est-ce que le sexisme, selon vous ?

C’est créer des cases en fonction des hommes et des femmes pour des choses qui n’ont rien à voir avec le fait d’être un homme ou une femme, avec des clichés comme « les femmes sont plus douces, n’ont pas le sens de l’orientation, n’ont pas les épaules pour être chefs d’entreprise... » J’entends ceux qui brandissent l’humour à tout bout de champ et je conçois que des remarques sexistes, homophobes et racistes peuvent prêter à sourire parfois, même si je suis en désaccord. Mais dès lors que l’on met le sexisme sur le même plan que le racisme, le ton se durcit alors que, dans tous les cas, il s'agit pourtant d’inégalités.
A ceux qui répondent que le sexisme n’est pas leur problème et qu’ils ont une boîte à faire tourner pour faire bouillir la marmite, je leur rappelle que les inégalités homme-femme sont notre problème à tous. 

Note : Ici l'explication de l'illustratrice auteure des étiquettes

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

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