De notre correspondant à Istanbul,
Le numéro 2 de Twitter, Colin Crowell, était dans la capitale lundi et mardi derniers 14 et 15 avril pour rencontrer des responsables gouvernementaux, et à l'issue de ces entretiens le ministre turc de la Communication Lütfi Elvan a émis un communiqué triomphant sur le thème « Ils ont cédé ! ». Pourtant, Twitter a rapidement démenti. Les discussions ont été qualifiées de « positives et bien intentionnées », les contacts se poursuivront via un avocat, paraît-il, et Twitter reste ouvert depuis le 3 avril. Mais, car il y a un « mais », cette tolérance est fragile. Le chef du gouvernement avait estimé que, même si elle était appliquée, il n'avait « aucun respect pour la décision de la Cour constitutionnelle » et il continue régulièrement à fustiger le site où certains utilisateurs le critiquent trop à son goût. Des responsables gouvernementaux ont promis de continuer à empêcher Twitter de nuire au gouvernement.
Les réclamations d’Ankara contre les concessions de Twitter
Ankara voulait faire fermer certains comptes jugés nocifs : il semble que les Turcs aient obtenu gain de cause sur ce point puisque des comptes personnels d'opposants notoires ont bien été interdits - mais ni le gouvernement ni Twitter ne confirment. Ce sont notamment les comptes qui diffusaient des enregistrements pirates attestant de certains actes de corruption ou de malversation au plus haut niveau de l'Etat. Ankara voulait également faire retirer des contenus, des messages jugés séditieux : là encore, gain de cause pour la Turquie, du moins si l'on en croit le ministre (200 messages auraient été supprimés). Ankara souhaitait également se faire donner des informations précises sur les détenteurs de ces comptes litigieux, mais là Twitter a dit : « Non, pas question, à moins d'une décision de la justice américaine ». Enfin, Ankara exigeait que la société Twitter ouvre un bureau de liaison en Turquie et paie des impôts sur des gains estimés à 35 millions de dollars annuels. Là encore, Twitter a poliment décliné l'invitation : « Pas dans un pays qui censure », ont répondu ses responsables.
Mais la guerre entre le gouvernement et internet est loin d'être close…
Youtube est toujours interdit d'accès. Là aussi, il y a des négociations avec le gouvernement turc, mais elles semblent bloquées. Facebook est menacé, le site a également été directement menacé par le Premier ministre comme pouvant être fermé, grâce à la nouvelle loi autorisant le gouvernement à censurer internet d'autorité, adoptée en février dernier. Soundcloud avait également été bloqué durant plusieurs semaines. Et lundi 21 avril s'ouvre à Izmir le procès de 29 bloggeurs qui risquent jusqu'à trois ans de prison pour avoir évoqué via Twitter les manifestations de juin dernier...